Cérémonie ennuyeuse aux César, palmarès tiède aux Oscars : Jean-Marc Lalanne dresse le bilan des deux shows du week-end.
En 2012, un cap avait été passé dans l’internationalisation du goût cinéphile puisque pour la première fois un même film, The Artist, remportait le César et l’oscar du Meilleur film. La même doublette consensuelle aurait pu se reproduire cette année, à nouveau en faveur d’un film français, si Amour avait été lauréat dans la catégorie Meilleur film des deux côtés de l’Atlantique (même si techniquement, le film d’Haneke concourrait sous la bannière autrichienne aux Oscars).
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Ce ne fut pas, mais on n’est pas passé loin, puisque les deux cérémonies ont récompensé les mêmes films en miroir dans les catégories Meilleur film et Meilleur film étranger. César du Meilleur film et Oscar du Meilleur film étranger donc pour Amour et César du Meilleur film étranger et oscar du meilleur film pour Argo de Ben Affleck. Si on considère qu’avant, le premier avait obtenu une Palme d’or et que les deux se sont déjà partagés des Bafta et des Golden Globes, ce week-end d’Oscars et César pour les deux films marque la fin d’un parcours sans faute et confirme le développement d’un parcours de prix qui mène de Cannes au red carpet hollywoodien et se resserre sur très peu de films, véritables bêtes à prix, qui aspirent toutes les récompenses autour de la planète.
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Ni l’un ni l’autre n’a néanmoins opéré une razzia exclusive des récompenses. Aux César, si Amour mène la danse avec cinq statuettes (film, réalisateur, acteur, actrice, scénario), De rouille et d’os le talonne avec quatre (adaptation, espoir masculin, musique, montage) et Les Adieux à la reine en obtient trois (photo, costumes, décors). Aux Oscars, c’est L’Odyssée de Pi, le huis-clos marin à ciel ouvert d’Ang Lee qui tient la corde avec quatre trophées (dont meilleur réalisateur). Les misérables accommodés à la sauce Broadway (ils avaient pourtant déjà beaucoup soufferts et ne méritaient pas ça, les pauvres) font jeu égal avec Argo, avec trois statuettes, tandis que Lincoln de Spielberg en ramasse deux (dont un troisième sacre pour Daniel Day Lewis).
Dans les deux cérémonies, ce sont les films qu’on préfère qui se retrouvent le bec dans l’eau. Zéro César, c’est le score du génial Holy Motors de Léos Carax. Ce qui, à tout prendre, a plus de panache que l’unique oscar du montage son du très beau Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow.
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Au niveau du show, on ne retiendra pas grand-chose d’une cérémonie des César à l’arrière-goût acrimonieux (vannes vachardes, grossièreté généralisée). Aux Oscars en revanche, quelques moments au devenir culte comme le gadin gracieux de Jennifer Lawrence se prenant les pieds dans sa robe longue et se rétamant dans les trois marches du petit escalier, avant d’être secourue par Jean Dujardin. Sans oublier le happening aussi surprenant que saugrenu de fin de cérémonie : l’Oscar du Meilleur film a été annoncé par Michelle Obama en duplex de la Maison-Blanche. Ce qui, en creux, constituait la critique la plus pertinente du film lauréat. Lauriers tressés à la CIA, réhabilitation du bilan de Carter, sommet d’impérialisme candide, Argo est en effet un parfait film de propagande, qui méritait bien d’être consacré en retour par la Maison-Blanche.
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