Voyage en Sicile, dont le cinéaste explore les poches de résistance culturelle.
Vincent Dieutre reprend ses pérégrinations européennes interrompues depuis une dizaine d’années (Mon voyage d’hiver, 2003). De retour en Italie, il sillonne la Sicile, entre Palerme, Catane et Syracuse. Reléguant cette fois la part autobiographique au second plan – bien qu’il reste l’acteur principal du film –, le cinéaste s’adonne à la réflexion politique en s’appuyant sur le livre Survivance des lucioles du philosophe Georges Didi-Huberman (qui intervient dans le film).
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Une réfutation nuancée d’un texte de Pier Paolo Pasolini sur la “disparition des lucioles” ; celui-ci utilisant comme métaphore l’extinction supposée de ces insectes lumineux – représentant l’art populaire, l’humanisme, l’engagement politique –, anéantis par le fascisme insidieux d’une industrie vectrice de “génocide culturel”. Didi-Huberman, lui, rappelle l’existence de lueurs et d’îlots de résistance.
Le mal-être de l’Europe
Pour asseoir sa démonstration, Dieutre fait appel aux marionnettes traditionnelles siciliennes, les Pupi, dont des saynètes pimentent le film et en théâtralisent les étapes. Les figurines guerrières de Charlemagne et de son neveu Roland (Orlando en Italie) expriment le mal-être de l’Europe. Plus concrètement, le cinéaste évoque le statut des homosexuels en Sicile (qui manifestent dans la rue), s’intéresse aux militants politiques qui occupent un théâtre ou se préoccupent de la situation des migrants parqués sur l’île de Lampedusa.
Autrement dit, tout en continuant à cultiver son sens de la contemplation esthétique et son hédonisme alerte, le cinéaste rappelle avec grâce que partout persistent, avec ténacité et discrétion, des lucioles humanistes et solidaires.
Orlando Ferito de Vincent Dieutre (Fr., It., 2013, 1 h 44)
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