Un court métrage qui envisage la noirceur sociale comme une drôle de comédie et acte le passage réussi l’actrice à la réalisation.
On connaissait Ariane Labed actrice, icône frondeuse d’un jeune cinéma grec (Attenberg) et français (Fidelio, l’odyssée d’Alice). Lors de son passage à la Quinzaine des réalisateurs, l’année dernière, on la découvrait cinéaste et cinéphile. Pour parler de son court métrage Olla, elle invoquait Barbara Loden et Chantal Akerman. C’est en effet au puissant Jeanne Dielman de la cinéaste belge que l’on pense devant ce premier film qui, pourtant, ne ressemble à aucun autre.
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“Olla”, le premier court très prometteur de l’actrice Ariane Labed
Débarquée comme un petit Alien à la chevelure orange dans la brume d’un bled non identifié, l’étrangère Olla est faite femme au foyer par son hôte – on comprend que la rencontre tient plus d’un compromis affectif/financier que du coup de foudre 2.0. On la baptise Lola et on lui indique le chemin des fourneaux.
Presque sans voix (elle baragouine quelques mots de français), presque sans nom, Olla devenue Lola est aliénée mais pas dépossédée. Son corps est bien vivant comme le montre une séquence hilarante de pole dance devant la mère ankylosée ou une autre, fameuse, de masturbation en cuisine, qui sont autant de moments de fuite pour survivre à ce monde maniaque.
Ce que raconte Labed, ici, est une histoire d’enfermement et de sauvetage. Plutôt que d’en dramatiser la noirceur sociale et sans pour autant l’évincer, elle l’envisage comme une drôle de comédie, celle qui sait lier humour et désespoir, tragique et légèreté. Label détourne les poncifs qu’appellent son “sujet” et sa mise en scène, faussement rigide, matinée d’une touche de burlesque, trouve sa logique comique dans une série d’indices génialement codés (le fauteuil de la mamie, les patins d’intérieur…).
Enfin, Olla déploie toute son intensité (émouvante) quand il balaye tout cynisme en un seul geste : une caresse sur la joue d’une vieille dame et un regard partagé entre deux femmes, complices. Incontestablement, le début d’une œuvre, que l’on espère, voir grandir.
Olla d’Ariane Labed, avec Romanna Lobach, Jenny Bellay, Grégoire Tachnakian, Gall Gaspard (Fr., G.-B., 2019, 27 min). En VOD
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