Troisième volet de la franchise lounge de Soderbergh. Paresseux.
Depuis son retour en grâce en 1998, avec le polar Hors d’atteinte, Steven Soderbergh enchaîne les films. Si l’on inclut sa participation à l’œuvre collective Eros, en 2004, Ocean’s 13, le troisième volet des aventures de Danny Ocean et de sa troupe de voleurs, est son douzième opus en neuf ans. On connaît la logique, financière et artistique, qui permet au réalisateur d’additionner les projets avec une telle célérité : le changement constant d’échelle qui le fait passer d’une grosse machine hollywoodienne (cette série des Ocean) à une microproduction expérimentale (la tentative Bubble diffusée, en 2005, via internet) en passant par un film moyen indépendant (le récent The Good German). Au fil du temps, cependant, cette stratégie devient de plus en plus difficile à tenir. Le cumul des films finit, en effet, par conduire à une mauvaise confusion des genres, comme si Soderbergh ne savait plus très bien lui-même sur quel script il était en train de plancher. Dans Ocean’s 13, le cinéaste ne semble, en particulier, que très peu s’intéresser à la mise en place du hold-up qui devrait pourtant être le centre névralgique de son entreprise. Tout le charme spécifique du film de braquage, qui tient au jeu d’écart délicat entre deux mises en scène, celle que l’on anticipe et celle qui se réalise, est ainsi passé par pertes et profits, la bande à Ocean cherchant moins ici à cambrioler le casino d’Al Pacino (le treizième invité, c’est lui) qu’à foutre en l’air sa soirée d’ouverture. Ce qui est à la fois plus facile et nettement moins captivant. En lieu et place, Soderbergh développe des intrigues secondaires qui, sans rien apporter d’essentiel au complot central, reprennent plutôt, de façon bizarrement parodique, la matière de ses films précédents. Une fausse révolte ouvrière dans une usine mexicaine rejoue, par exemple, de manière satirique, les rapports économiques transfrontaliers qui étaient au cœur de Traffic (2000). Surtout, le calcul budgétaire, pas forcément honteux qui prédomine à l’existence même d’un projet comme Ocean’s 13 (tourner un blockbuster pour renflouer les caisses), semble dorénavant peser sur le réalisateur au point qu’il fasse de sa mauvaise conscience un des éléments moteurs du scénario. Le running gag du film consiste ainsi en la suite de calamités qui s’abattent, à intervalle régulier, sur un malheureux critique chargé de donner ses étoiles au nouveau casino. Dans le dernier plan, un jackpot truqué vient le dédommager de toutes les avanies subies durant la projection. Voilà le critique (de cinéma) aimablement prévenu : inutile de chercher à évaluer ce qui se passe à l’écran, seuls comptent les résultats au box-office. On ne sait ce qui agace le plus ici, de la paresse ou du cynisme. Car, enfin, à l’époque d’Ocean’s 11 (2001), quand Soderbergh ne concevait pas seulement les blockbusters comme des machines à fric, il faisait aussi de meilleurs films.
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