Le récit patient du délitement d’un couple dans la campagne mexicaine. Un Reygadas plus dépouillé que les précédents.
Nuestro tiempo est d’abord un film d’extérieur, comme un éloge calme qui célèbre la beauté des plaines infinies de la campagne mexicaine. Au milieu du paysage, des enfants jouent aux pirates sur un lac, sous un arbre des ados se draguent. Un peu plus loin, des taureaux bondissent autour d’un ranch tenu par Juan (interprété par le réalisateur) et sa femme, Esther. Puis l’étau se resserre, l’espace avec lui : Esther a un amant. Les plans flottant dans la nature laissent place à des cadres fixes d’un salon, d’une cuisine ou d’une chambre d’hôtel. Pourtant, Juan est ouvert, il accepte que sa femme ait une relation, mais il veut être au courant. Peut-être un peu trop.
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Nuestro tiempo avance à pas de loup, d’abord de l’extérieur à l’intérieur, puis décrypte minutieusement et cliniquement le délitement progressif de ce couple qui semblait inséparable. Et petit à petit, le récit se complexifie, brouille ses pistes pour naviguer presque vers le thriller. On ne saurait dire si le cinéaste prend plaisir à filmer cette fin d’histoire. Mais ce qui est certain, c’est qu’il cultive ouvertement une ambiguïté sexuelle et morale. Pas encore totalement guéri de son goût agaçant pour les gageures formelles, Reygadas s’éloigne pourtant de la lourdeur plastique et théorique de ses derniers films et préfère, dans Nuestro tiempo, l’étude patiente de son sujet plutôt qu’une démonstration de force vaniteuse.
Nuestro tiempo de Carlos Reygadas (Mex., 2018, 2 h 58)
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