Un âpre mélo qui bouscule habilement nos certitudes.
Au début, long plan fixe depuis l’intérieur d’une voiture, sous la pluie, scandé par le battement robotique des essuie-glaces. Métaphore ? De quoi ? La voiture finit par démarrer, conduite par Malena, dont on perçoit au fil des infos distillées qu’elle est médecin à la ville, divorcée, sans enfant, et qu’elle part dans une région pauvre et reculée pour adopter un bébé de façon illégale.
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Notre enfant brasse plusieurs thématiques fortes, d’un désir de maternité quasi maladif à la fracture ethnico-sociale en passant par les mafias faisant leur miel de la misère. Diego Lerman alterne le chaud et le froid dans cette minitragédie à fort ancrage documentaire : on ressent ainsi de l’empathie pour Malena et son envie d’enfant puis de l’antipathie pour ses manières parfois brutales de bourgeoise autocentrée.
De même, les familles nous choquent pour leur trafic de nourrissons mais ce sentiment est tempéré par leur condition misérable et par la douleur d’une mère écartelée entre attachement à son nouveau-né et survie économique. Toutes les saloperies indémêlables de notre monde inégalitaire sont concentrées dans cet âpre mélo qui fait osciller les affects d’un extrême à l’autre (les essuie-glaces du début ?). A l’encontre de tout manichéisme, porté par une exceptionnelle Bárbara Lennie (La Piel que habito, prochainement dans Everybody Knows d’Asghar Farhadi), Notre enfant bouscule subtilement nos certitudes morales et politiques.
Notre enfant de Diego Lerman Avec Bárbara Lennie, Daniel Aráoz (Arg., Bre., Pol., Fr., Dan., 2018, 1 h 35)
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