Biopic un peu plat du rappeur assassiné Notorious B.I.G.
Neuf mars 1997. Notorious B.I.G. se fait assassiner par balle alors qu’il sort d’une discothèque à Los Angeles ; six mois auparavant, c’était son meilleur ennemi, Tupac Shakur, qui subissait, à Las Vegas, un sort équivalent. Douze ans après cet événement fondateur dans la mythologie du hip-hop – probablement même le plus important –, la guerre East Coast/West Coast (dont Biggie et Tupac étaient les fers de lance) est finie, sudistes et autotunés ont pris le pouvoir, et la grande centrifugeuse hollywoodienne semble enfin prête à laver le linge sale du rap business américain. Or quelle plus efficace machine à laver, à ôter toute rugosité au réel, à en lisser les accrocs qu’un biopic ? Ça aurait pu tomber sur Tupac, c’est Biggie qui s’y colle, premier rappeur à bénéficier, de façon posthume, d’un tel traitement (Eminen et 50 Cent étant, paraît-il, encore vivants).
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le voilà donc, le nounours de Brooklyn (Jamal Woolard, casté pour sa ressemblance physique), fat kid boudé par les filles (trauma n° 1), brave fiston à sa maman (Angela Bassett, charmante revenante) mais abandonné par son papa (trauma n° 2), gamin fasciné par le fric depuis qu’il en a vu les effets concrets sur sa street credibility (trauma n° 3)… Et l’on pourrait aligner ainsi les exemples à l’infini, tant le film déroule avec une régularité de métronome son programme de biopic académique, qui ne cherche jamais à troubler sa petite mécanique de cause à effet où chaque rebondissement s’inscrit dans le Grand Dessein de la Vie – jusqu’à la rédemption finale, à n’en pas douter.
On l’aura compris, Notorious-B.I.G.-le-biopic est peu exaltant, et l’on saisit pourquoi à la découverte des producteurs au générique : Voletta Wallace (la mère de Biggie) et Sean Combs aka Puff Daddy, à l’époque son manager et par ailleurs (simple détail) suspecté d’avoir ralenti l’enquête criminelle (voir le documentaire de Nick Broomfield, Biggie and Tupac)… Difficile dans ces conditions d’attendre autre chose qu’un panégyrique légèrement adipeux ; et l’on se prend à rêver du même scénario tourné par Scorsese ou Ferrara…
Pourtant, si le réalisateur George Tillman Jr. (Les Chemins de la dignité) se contente du minimum syndical dans son ambition biographique, il parvient à diffuser, par sa modestie bienvenue (pas de stars oscarisables, facture clipesque mais exempte de pompiérisme), une certaine séduction, sur la longueur. Comme la plupart des biopics musicaux (Ray, Walk the Line…), Notorious B.I.G. ambitionne avant tout de combler les attentes des mélomanes, et c’est avec un certain brio qu’il nous replonge dans le chaudron créatif du rap new-yorkais des 90’s.
Au jeu de la reconstitution, c’est la fiévreuse Lil’ Kim (la petite amie de Biggie, jouée par la débutante et néanmoins excellente Naturi Naughton) qui impressionne le plus, enflammant régulièrement le film de son flow rageur et ciselé : un peu de brutalité dans un monde trop doux.
{"type":"Banniere-Basse"}