Après Tornatore et son calamiteux Cinema Paradiso, Scola et le non moins calamiteux Splendor, voilà Marco Ferreri qui cède lui aussi à la manie de la célébration du malheureux cinématographe tombé au champ d’honneur, le cadavre encore chaud, livré aux vautours et aux “commémorateurs” de tout poil. Autant le dire tout de suite pour […]
Après Tornatore et son calamiteux Cinema Paradiso, Scola et le non moins calamiteux Splendor, voilà Marco Ferreri qui cède lui aussi à la manie de la célébration du malheureux cinématographe tombé au champ d’honneur, le cadavre encore chaud, livré aux vautours et aux « commémorateurs » de tout poil. Autant le dire tout de suite pour ne plus jamais avoir à en parler, Nitrate d’argent est un interminable pensum, indigne du talent de son auteur. Ferreri n’est doué ni pour la nostalgie sacrificielle ni pour la mise en bière du défunt. Ainsi, il prouve serait-ce a contrario qu’il reste un grand cinéaste, irréductible aux projets absurdes et aux veillées funèbres.
En revanche, Journal d’un vice est un vrai film de Ferreri, certes très mineur et imparfait si on le compare à ses chefs-d’œuvre (Dillinger est mort, Liza, La Dernière femme) mais témoin de la vitalité d’un metteur en scène toujours en mouvement, constamment inquiet. S’ouvrant sur une plage (vieille obsession ferrerienne, synonyme d’accès à la femme mais aussi de fuite illusoire vers des rêves d’ailleurs), le film est comme d’habitude, serait-on tenté de dire l’histoire d’une obsession, d’une idée fixe, d’une connaissance impossible. Par le biais de son journal intime, un homme solitaire et terriblement ordinaire tente de recenser ses humeurs, de faire le compte de ses fringales (culinaires ou sexuelles), de la qualité de leur assouvissement et de la reprise incontrôlable de son désir. Il mesure son sexe : l’organe fait seize centimètres la moyenne, forcément.
Dans une Rome hivernale et sale, Benito confronte sans cesse ses clichés personnels, ses chromos poisseux et médiocres avec la réalité des femmes rencontrées et parfois vainement possédées dans sa vie quotidienne. Bien sûr, le titre du film est ironique. Benito est beaucoup trop banal pour être qualifié de « vicieux », il est juste agité par un désir mécanique et encombrant. Qu’elle soit icône érotique ou camarade de jeux humides, la femme demeure trop incarnée pour satisfaire la multiplicité mouvante des pulsions. Chez Ferreri, l’homme est un moteur qui fait du surplace, un éjaculateur perpétuel dont la semence ne sert à rien. Consommateur de sa vie, il ne peut que s’en lasser. Comme ses prédécesseurs, le « héros » de Journal d’un vice ne laissera que la trace vite oubliée de ses ruminations stériles. Si celles de Ferreri ne sont pas nouvelles, elles ont toujours la force du désespoir un désespoir jamais plaintif et toujours corrosif.
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