Après « Grave » en 2017, qui avait provoqué des malaises lors de sa projection au Festival de Cannes, un nouveau film français génère des réactions extrêmes. La cinéaste Claire Denis, pionnière du genre de l’horreur dans le cinéma français, a bousculé les foules lors de la projection de son dernier film, dont certains ne sont pas sortis indemnes.
La réputation des films de Claire Denis précèdent souvent leur sortie en salles. Projeté au Festival international du film de Toronto ce dimanche 9 septembre, son dernier film, High Life, ne semble pas déroger au goût du scandale et de la controverse qui habite sa filmographie. Spectateurs en pleurs, quittant la salle de façon prématurée au bout de 15 minutes, réactions épidermiques en chaîne (la légende raconte qu’une internaute aurait vomi dans les toilettes), autant de phénomènes relayés sur les réseaux sociaux qui semblent déjà construire une aura sulfureuse et magnétique au film. Une première internaute raconte ainsi : « Je suis partie à peu près à la moitié du film pour vomir dans les toilettes et j’ai aussi vu une vingtaine de personnes sortir, dont une qui pleurait, tremblant beaucoup ».
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
I left about halfway through the film and threw up in the loos and saw about 20 people walk out – one crying, many shaking. So… that’s High Life #tiff18
— Liz Mulhall (@lizmulhall) September 10, 2018
Un scénario dans l’espace propice aux réactions tranchées
Dans High Life, Claire Denis se concentre sur l’histoire d’un groupe de criminels, condamnés par la justice, qui participent à une mission spatiale gouvernementale, afin de trouver de nouvelles sources d’énergie. La réalisatrice a déclaré à ce sujet avoir voulu réaliser un film de prison – une dénomination paradoxale, pour un film dont l’action aérienne se situe dans l’espace, mais qui résume parfaitement les enjeux de la mise en scène de Claire Denis. Les internautes réfractaires au film n’ont d’ailleurs pas manqué de multiplier les jeux de mot autour de l’action du film, notamment l’astronaute Andy Howell, qui parle ironiquement de « poubelle de l’espace », ajoutant même que le film vaut la peine d’être vu tant il est mauvais.
Claire Denis’ #HighLife is space garbage. It is so astronomically bad, you almost have to see it because the awe of how something this catastrophically bad got made is something you’ll never forget. Everyone involved should fire their agents. #TIFF18
— Andy Howell (@d_a_howell) September 10, 2018
D’autres internautes soulignent la terreur provoquée tout en la célébrant : « C’est dur, cruel, et étrangement beau », et louent une expérience de cinéma novatrice. « High Life rejoint fièrement les rangs des films de science-fiction cérébraux épiques et hallucinants ! C’est un de ces films où il faut expérimenter plutôt que regarder. »
#HighLife #TIFF2018 shocking. Uncomfortable. Revealing. Lonely. A fantastic and disturbing look at humanity, the isolation of space, and the two together. People walked out but I highly recommend. It’s harsh, cruel, and strangely beautiful.
— Nathalie Holroyd (@nathalieholroyd) September 10, 2018
#Highlife proudly joins the ranks of epic, mind-bending, cerebral sci-fi films! It’s one of those movies where it’s something to experience, rather than watch. #TIFF2018
— Octavio (@WebbSlynger78) September 10, 2018
Un scénario de science-fiction propice à développer de nombreuses séquences claustrophobes, et dont une scène en particulier focalise déjà les commentaires des critiques. David Ehrlich, critique d’IndieWire, rapporte ainsi qu’une séquence montre Juliette Binoche se promenant avec le sperme de Robert Pattinson: « J’ai de bonnes nouvelles pour ceux qui attendaient de voir Juliette Binoche transporter une flaque de semence de Robert Pattinson dans les couloirs d’un vaisseau vide ».
https://twitter.com/davidehrlich/status/1038993259601772544
La présence carnivore des films de Claire Denis dans les festivals
Un scénario qui rappelle la rencontre déjà cauchemardesque que certains spectateurs avaient fait lors de la projection cannoise de Trouble Every Day en 2001. Présenté en séance spéciale à minuit (un horaire déjà révélateur du statut marginal du film à l’époque, qui introduit le genre du gore dans le cinéma français, alors peu répandu), et hors compétition, le film avait déchaîné des réactions clivantes. Les films de Claire Denis ont une façon d’occuper l’espace des festivals qui relève déjà, en soi, d’une mise en scène fascinante et carnivore : présence vampirisante de ses films, qui balayent tout autour d’eux, creusent jusqu’à la moelle la résistance du public. Mise en scène aussi parce que ces réactions polarisées – l’adulation ou le rejet de la part des critiques, sont une façon de modeler l’attente, de susciter un désir fervent chez ceux qui n’ont pas encore vu le film.
Le film sortira le 7 novembre prochain.
{"type":"Banniere-Basse"}