Un biopic très officiel et ultra consensuel du groupe mythique du gangsta rap californien N.W.A.
Après seize ans d’un silence assourdissant, Dr. Dre effectuait en plein cœur de l’été un brusque retour aux affaires du rap US, publiant un troisième album solo (Compton – A Soundtrack) tandis que sortait dans les salles américaines le biopic très autorisé de son groupe d’origine : N.W.A – Straight Outta Compton.
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Une soudaine précipitation dans la carrière d’un producteur au perfectionnisme quasi obsessionnel, et dont on ne distinguait pas encore les réelles motivations : l’artiste amorçait-il ici un nouveau départ, ou cherchait-il simplement à fixer sa propre mythologie pour rappeler à l’industrie qui est le patron historique du gangsta-rap ?
Une reconstitution hyperréaliste
Le film, qui sort aujourd’hui en France après un triomphe aux Etats-Unis, confirme sans nuance la seconde hypothèse. Produit par Dre lui-même, avec son compère Ice Cube, il relate la naissance du collectif N.W.A, pionnier flamboyant du rap West Coast né à la fin des années 80 dans un fameux quartier dévasté de Los Angeles, Compton, terrain d’un affrontement entre flics suprématistes et lascars rêveurs.
Des premiers enregistrements, bricolés dans des studios de fortune, aux premiers concerts et contrats juteux, l’ex-clippeur F. Gary Gray emballe sa success story avec une efficacité redoutable et une séduisante économie de moyens, qui se détourne (presque) du folklore gangsta au profit d’une reconstitution sèche, hyperréaliste de l’époque.
Mais au-delà de ses qualités de fabrication, le film déçoit assez vite tant il semble verrouillé de toutes parts, inféodé au point de vue de ses puissants producteurs. Au fond, N.W.A – Straight Outta Compton évoque à peine l’incroyable nébuleuse rap qui agita la Côte Ouest de la fin des 80’s, pas plus qu’il ne prend en charge le climat politique qui lui servait de décor ; le vrai sujet du film, c’est la manière dont Dre et Ice Cube ont bâti un empire.
Une entreprise d’autopromo complaisante et policée
Les deux hommes, impliqués dans l’écriture du scénario, s’attribuent les beaux rôles de ce mythe musical, apparaissant tels des héros hyper lucides, derniers survivants d’une époque maudite où tous leurs anciens potes finirent aspirés par différents démons (l’argent, la dope, la violence, et le sida pour Eazy-E).
Jusque dans sa façon de gommer les détails les plus embarrassants de leur biographie, dont les rapports brutaux qu’entretenait Dre avec les femmes, le film s’apparente ainsi à une vaste entreprise d’autopromo complaisante et policée ; le biopic du “groupe le plus dangereux du monde” qui n’avait peur de rien, sinon de son propre passé.
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