Présenté en séance spéciale au Festival de Cannes 2022, le documentaire de Patricio Guzmán revient sur la révolte qui a secoué le Chili en octobre 2019.
“Le tournage de Mon pays imaginaire a été différent, car j’ai 80 ans aujourd’hui et que la police est encore bien plus violente qu’hier”, raconte Patricio Guzmán. Après sa récente trilogie poétique, le cinéaste revient avec un documentaire au beau titre, où son “imaginaire” relève moins d’une chimère que d’une perpétuelle construction, celui d’un pays, le Chili, qui cherche encore à s’inventer.
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Guzmán narre lui-même en voix off sa sidération de voir une telle révolution se rejouer en 2019, étourdi de retrouver les mêmes slogans de l’Unité Populaire d’Allende. Après celle de 1973, une nouvelle explosion sociale a bien lieu.
Le sens commun d’un peuple
Tout commence et se termine par les morceaux de pavés, une pierre superbement filmée, statique, ruisselante, poids et symbole d’une révolte qui agite les rues. Puis des plans plus prosaïques recueillent les témoignages de femmes, une parole précise qui remet à hauteur la force du peuple. “Avec la révolte, j’ai fleuri”, dit cette jeune femme cagoulée, masque à gaz autour du cou et fleurs en couronne. On retrouve ensuite la rue, l’abattement des tôles, où les coups de pied deviennent le métronome du renversement en cours, jusqu’à ce que le peuple soit saisi en vue aérienne dans sa globalité, une masse picturale, multicolore et saisissante de beauté qui remplit les artères de Santiago.
C’est tout le mouvement du film qui réussit, dans ses allers-retours verticaux, à capter à la fois les destins uniques et le sens commun d’un peuple, à prendre le pouls du fond de l’air, rouge comme un désir brûlant de justice.
Mon pays imaginaire de Patricio Guzmán
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