Mon homme se voudrait provocant, il n’est que vulgaire. En panne d’inspiration et de vigueur, le système Blier ne bande plus. Trop belle pour toi reste jusqu’à nouvel ordre le sommet du « système Blier » : de bons acteurs heureux de dire un dialogue écrit pour eux à la virgule près, une construction narrative suffisamment tordue […]
Mon homme se voudrait provocant, il n’est que vulgaire. En panne d’inspiration et de vigueur, le système Blier ne bande plus.
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Trop belle pour toi reste jusqu’à nouvel ordre le sommet du « système Blier » : de bons acteurs heureux de dire un dialogue écrit pour eux à la virgule près, une construction narrative suffisamment tordue pour masquer les vides, des thèmes assez crus pour épater le bourgeois et émouvoir les midinettes. Avec Merci la vie et ses déportés (encore mieux nourris que ceux de Spielberg !) qui tombaient au ralenti des wagons, la machine commençait à tourner à vide tout en dégageant des odeurs de plus en plus rances. Depuis, le cinéma de Bertrand Blier obéit à une loi simple : plus ça va, moins ça va. Après le déjà redoutable Un, deux, trois, soleil, Mon homme vient confirmer la tendance.
Pourtant, comme souvent chez Blier, ça commence plutôt bien. Quelques mesures ultrasensuelles de Barry White, Anouk Grinberg juchée sur un tabouret au fond du passage Jouffroy, l’arrivée de Dominique Valadié (moins bien que dans La Fille seule, mais bien quand même) : les cinq premières minutes font illusion. Et après ? Rien. Le film s’arrête là. Il ne nous reste plus qu’à le subir pendant une heure et demie, aussi longue qu’un jour sans débat avec Jean-François Rauger. Sur cette histoire de pute « pute heureuse », insiste Blier qui a étudié la question de près et de SDF accédant à l’enviable condition de souteneur, Mon homme se résume à une suite de sketches plus affligeants les uns que les autres. C’est du niveau de Karl Zéro chez Sébastien, du Petit théâtre de Bouvard ou des Grosses têtes. Faute de scénario, totalement à court d’inspiration, Blier essaye d’appliquer mécaniquement ses trucs habituels (abus de flash-back tortueux, confessions au spectateur, construction éclatée, langue verte). Hélas, plus rien ne fonctionne. S’il arrive que le numéro de Lanvin (parfait en clone de Bernard Tapie) fasse esquisser un sourire, on le ravale aussitôt devant l’extrême lourdeur du propos. Le drame est que le film ne se contente pas d’être une comédie ratée. Il a aussi l’ambition d’aborder de front la représentation de l’amour physique. Dans les films précédents, le sexe était montré comme une simple fonction vitale. Ici, il se veut philosophique et sert à exposer une thèse d’une grande et profonde originalité : la veulerie des hommes opposée à la générosité des femmes. Du coup, aussi interminables et prétentieuses que pauvrement filmées, les scènes de cul sont une catastrophe majeure d’autant plus qu’elles sont soulignées par l’insupportable musique de Górecki. Le plus triste, c’est que Blier n’a pu résister à nous faire le coup habituel des films de prostitution : le catalogue des perversions. Très loin de Belle de jour, ou même de La Femme flambée, Mon homme penche alors vers le minitel rose. Blier se voudrait provocant, il n’arrive même pas à être grossier, juste désespérément vulgaire.
Ajoutons que transformer une actrice aussi douée que Valeria Bruni-Tedeschi en une sorte de godiche hommasse, inspirée du Depardieu travesti de Tenue de soirée, n’est que la pire faute de goût d’un film qui n’en manque pas.
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