Une Communauté dans les Highlands comme utopie mélancolique. Inégal, parfois touchant.
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On découvre le décor de Mister Lonely – un Disneyland du pauvre bien plus beau que le vrai : un château écossais perdu dans les Highlands – en même temps qu’un sosie de Michael Jackson, étrange rescapé d’un monde brumeux.
Ce Bambi dans la dèche a quitté Paris (et son agent Renard, alias Leos Carax) pour suivre une fausse Marilyn Monroe dans sa communauté composée de son mari Charlie Chaplin (Denis Lavant), de sa fille Shirley Temple, et d’autres sosies dont ceux de James Dean, de la reine Elisabeth (Anita Pallenberg) et de Madonna.
Michael pose sur ce lieu un regard candide de faon égaré et émerveillé proche de celui d’Harmony Korine, qui filme ses freaks avec amour et lucidité comme les membres de sa propre famille. En parallèle, on assiste au détournement surréaliste de l’activité humanitaire de religieuses, qu’un prêtre (Werner Herzog, déjà acteur dans le très beau Julian Donkey-Boy) pousse à des expériences périlleusement mystiques. Au programme, montée au septième ciel et baptême de l’air expéditif. Un monde de croyances s’offre ainsi à nous, qui tourne vite sur lui-même, tel un manège désenchanté.
Présenté au Festival de Cannes l’année dernière, le dernier Harmony Korine est passé relativement inaperçu, comme si son titre, tiré d’une superbe chanson de Bobby Vinton, était tristement prophétique. Pourtant, le sujet de Mister Lonely a de quoi séduire, non pas en raison de son potentiel trop ouvertement poétique et mélancolique, mais par sa dimension politique. Car, comme dans De la guerre de Bertrand Bonello, il est question d’expérimenter une utopie – ici vivre dans un monde fantasmé, peuplé d’icônes – qui résonne tout autant comme la promesse de la reconnaissance d’une singularité que comme le révélateur d’un profond malaise existentiel.
A ce titre, le film de Korine s’avère être le plus malade des deux, rongé qu’il est par cette crise identitaire au point de ne pas vraiment lui livrer bataille, sinon très mollement, restant coincé dans une contemplation de ses personnages un peu trop passive, pas assez tenue formellement.
Bien que traversé par de petites touches lumineuses et porté par l’interprétation poignante de Samantha Morton, tout bonnement prodigieuse, Mister Lonely reste figé dans une imagerie poético-iconoclaste un peu plate, qu’il ne dépasse que rarement. Comme si Korine, obsédé par ses modèles (Browning et Buñuel, entre autres), s’était mis dans la peau de leurs sosies, se condamnant à livrer une pâle copie de leurs cinémas.
Amélie Dubois
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