Mission impossible pour Tom Cruise, star/producteur de la franchise : réfréner sa passion pour les poursuites au galop. Et on l’aime pour ça.
Sacré Tom Cruise : il nous avait promis le précédent Mission: Impossible (Protocole Fantôme) comme un passage de flambeau à la jeunesse (Jeremy Renner), un hymne au travail d’équipe pour adoucir l’ego-trip de la franchise (Tom Cruise EST Mission: Impossible). Mais le naturel du “Tom Cruise movie”, au service de sa star/producteur, revient au galop. Et on l’aime pour ça.
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A une époque où l’on se fiche de savoir si The Rock fait ses cascades ou si Tom Hardy est doublé dans Mad Max: Fury Road, Tom (et son plan de com’) est bien l’ultime cause d’émoi pour le spectateur blasé qui paie pour le voir payer de sa personne – et vérifier que c’est bien lui accroché à un vrai avion au décollage. L’énergie conquérante de Cruise est le grand sujet de sa filmo et de sa vie, déployée dans ses blockbusters, contrariée par ses frasques en public ou par Kubrick (Eyes Wide Shut).
Des films bibliques
Toujours mis en perspective en tout cas. Il y a ici un plan très drôle où l’acteur a l’air d’être paniqué parce qu’une poursuite à moto risque de se faire sans lui. Bien sûr, il repart et court – il y aurait tout une thèse à écrire sur son trot volontaire. Dans la peau de l’agent Ethan Hunt, il parcourt sans relâche le globe traquer le Syndicat, organisation terroriste (en gros NSA + Etat islamique).
Il est le seul à croire à son existence. Hunt est décrit en “joueur” mais il a surtout des airs de prophète ayant raison contre tout le monde face au désastre – les Mission: Impossible sont des films assez bibliques, du De Palma hanté par le Livre de Job au Bird, où Hunt réunissait ses agents/apôtres dans une scène finale où il distribuait des smartphones en guise de pains.
Lorsque le chef bourru de la CIA (Alec Baldwin, avec sa voix d’acteur des années 40 qu’on écouterait lire l’annuaire pendant des heures) déclare que Hunt est “la manifestation du destin”, on sourit tout en sachant qu’il n’a pas tort. Mais Rogue Nation ne fait pas sonner les trompettes du Jugement Dernier et opte presque pour le sotto voce.
La ligne claire de Christopher McQuarrie
Les excellents morceaux de bravoure auraient pu accueillir la même folie de cartoon que dans Protocole Fantôme mais la mise en scène disciplinée, souvent élégante, de Christopher McQuarrie préfère la ligne claire, le plan qui dure. Pour mettre en valeur Cruise bien sûr, mais aussi les lieux – l’opéra de Vienne transformé en jeu de plateforme pour Hitchcock, un bassin où la caméra fait d’une plongée en apnée un classieux ballet aquatique.
Dans sa course, Cruise laisse loin les autres acteurs derrière (Renner, Simon Pegg, et Ving Rhames en yes men), sauf sa co-actrice, l’Anglo-Suédoise Rebecca Ferguson. En agent double trouble nommée Ilsa Faust (comme dans Casablanca ou Ilsa, la louve des SS), elle est le principal atout du film. Le nez d’Ingrid Bergman, le même mystère et port altier mais corrigé par le cinéma d’action : son jeu de pied et de jambes vaut le détour, pour danser et botter les fesses aux méchants. Même Tom Cruise/Hunt est totalement désemparé devant elle. Pas de quoi passer le test de Bechdel, certes, mais une proposition d’héroïne un peu plus rafraichissante que l’ordinaire hollywoodien (allo Marvel ?). Faust and Furious.
Mission: Impossible – Rogue Nation de Christopher McQuarrie, avec Tom Cruise, Rebecca Ferguson, Jeremy Renner, Simon Pegg (Etats-Unis, 2015, 2h12)
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