Suite et fin de la course de Mesrine vers la mort, orchestrée avec maestria par un cinéaste inspiré.
Plus imparfait que le premier volet (un Gérard Lanvin empêtré avec l’accent marseillais de son personnage, quelques moments de saturation du rythme), Mesrine, l’ennemi public n° 1 possède aussi ses points forts. Le premier en est Ludivine Sagnier. La comédienne interprète Sylvie Jeanjacquot, la dernière maîtresse du gangster. C’est le troisième personnage féminin qui peuple la vie de Mesrine. Elle complète l’éventail assez exhaustif des places qu’une telle vie peut assigner à une compagne. La première était celle de l’épouse straight, extérieure à la vie de banditisme de son époux, mère de ses enfants, pour qui le voyou essayait encore de maintenir la fiction d’une vie respectable dans ses apparences. Une fois ce leurre volé en éclats, vient le temps de la passion fusionnelle, du scénario à la Bonnie and Clyde, avec le personnage interprété arme au poing par Cécile de France. Mais là aussi, bien que sur des modalités différentes, la conscience que l’homme ira jusqu’au bout de son instinct de mort, et que pour le protéger il vaut mieux le quitter, aboutit à une rupture. La troisième femme n’a pas cette distance réflexive. Elle se confond presque aux trésors de la société de consommation que dérobe Mesrine. Elle est une parure, une marchandise de luxe, attendant toute la journée en se maquillant que son gangster viennent la couvrir de bijoux, elle est moins un alter ego qu’un signe supplémentaire de la solitude du personnage. Et Ludivine Sagnier, qui n’a pas son pareil pour dégager toute la profondeur tragique de filles données comme superficielles, rend particulièrement émouvante cette figure de femme-enfant inconséquente, assise sur le siège passager du truand lors de son exécution avec un caniche sur les genoux, comme une petite bourgeoise arrivée.Mais le point de capiton du film, à la fois de ce second volet et de l’ensemble de l’entreprise, c’est le dernier plan, énorme, extrêmement risqué et totalement réussi. Après avoir filmé le tourbillon de ceux qui s’agitent autour de la voiture criblée de balles (flics, médias, badauds), et alors que celui qui occupait jusque-là quasiment tous les plans n’est plus qu’une dépouille perdue dans un coin du cadre, Richet revient dans la voiture et donne le dernier mot à son personnage, fût-il muet. Après le cirque, le silence. La tête renversée sur son torse, comme après la guillotine, le visage de Mesrine nous apparaît en contre-plongée, tandis que le sang continue à s’écouler lentement de son front, comme une viande qui s’égoutte. L’œil est froid, mais pourtant, débarrassé de sa faconde de séducteur, Mesrine n’a jamais fait aussi peur. C’est l’instinct de mort, qui, triomphant, occupe désormais toute la place. La beauté du film tient à cette double vitesse. D’une part, la fougue de la fresque spectaculaire ; de l’autre, la méthodique dissection d’une tête de mort.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}