A l’occasion de la sortie d’“Oppenheimer” de Christopher Nolan, nous avons dressé un classement de nos dix films préférés sur la menace atomique. Si la majorité des œuvres se déroulent dans le contexte de la guerre froide, deux des entrées soulignent, avec le film de Nolan, un retour de la menace atomique dans nos esprits.
1. Hiroshima, mon amour d’Alain Resnais (1959)
À partir d’un scénario de Marguerite Duras, Alain Resnais signe un film bouleversant de sensualité mélancolique et l’oubli – incarné par Emmanuelle Riva et Eiji Okada. À la fois chant du cygne d’un amour et tragédie se déroulant dans l’Hiroshima post-bombardements, il déploie un récit déstructuré et une mise en scène d’une modernité folle, qui brouille la frontière entre fiction et documentaire.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
2. Docteur Folamour de Stanley Kubrick (1964)
Si les films sur la bombe atomique sont la plupart du temps dominés par un esprit de sérieux, Stanley Kurbick réalisé avec Docteur Folamour ce que Chaplin avait fait avec Le Dictateur à propos du nazisme : une farce acerbe, politique et loufoque. Porté par un Peter Sellers au sommet de son art comique et tourné en pleine guerre froide, il pointe avec acuité le climat paranoïaque de l’époque et l’absurde folie des puissants.
3. La Bombe de Peter Watkins (1966)
Récit dystopique et expérimental constitué à partir d’un profond travail de documentation sur les attaques nucléaires de Hiroshima et Nagasaki, mais aussi les bombardements massifs de la Seconde Guerre mondiale, le réalisateur britannique imagine les conséquences tant sociologiques que physiologiques qu’une attaque déclencherait en Angleterre.
4. Le Sacrifice d’Andreï Tarkovski (1986)
Si le réalisateur russe s’est aussi intéressé à la bombe dans Stalker, Le Sacrifice est, dans le style évanescent, méditatif et poétique qui lui est propre, une évidente réflexion sur la destruction du monde que permet la bombe atomique. Lorsqu’une attaque nucléaire se produit le jour de son anniversaire, un comédien tente de sceller un pacte avec Dieu pour annuler l’attaque ; mais en échange, il doit renoncer à ce qu’il a de plus cher au monde.
5. Pluie noire de Shōhei Imamura (1989)
Restauré en 2020 et adapté du roman de Masuji Ibuse, Pluie noire est un chef d’œuvre méconnu de l’histoire du cinéma. S’ouvrant sur une hallucinante séquence qui débute le matin du bombardement d’Hiroshima, il se poursuit ensuite quelques années après, dans une nature qui porte encore les stigmates de la catastrophe, comme le décrivait notre critique Léo Moser au moment de la ressortie du film : “Dans un sublime noir et blanc brûlé au soleil, comme la trace abrasive du rayonnement atomique, Imamura filme avec grâce et pudeur ce monde d’après. Aux visions apocalyptiques de l’explosion, qui occupent les dix premières minutes du film (puis un flash-back à son mitan), se substituent celles idylliques d’une nature virginale.”
6. Pacifiction d’Albert Serra (2022)
Plus grand film sorti en 2022, le chef-d’œuvre de cinéaste catalan nous renseigne sur le retour d’un climat de guerre (pas si) froide que nous vivons actuellement. Il se déploie sur une île paradisiaque où un politicien français, incarné par un Benoît Magimel tout en roublardise et en flegme calculateur, tente de rassurer la population locale sur l’absence de reprise des essais nucléaires par l’armée.
7. Missile de Frederick Wiseman (1988)
Avec le sens de l’observation dépouillé de tout commentaire et la précise captation des rouages des institutions, le documentariste américain filme quatorze jours dans le camp d’entraînement militaire chargé de la manipulation de la bombe H. Il permet à Wiseman de déployer une réflexion éthique sur l’utilisation de l’arme nucléaire.
8. Le Tombeau des lucioles d’Isao Takahata (1988)
Considéré comme l’un des plus grands films d’animation de l’histoire, Le Tombeau des lucioles est d’une noirceur absolument déchirante. Cette profondeur dramatique vient d’une mise en scène à hauteur d’enfant, puisque le climat tragique du Japon d’avant la capitulation qui suit Hiroshima est brossé à travers le récit de d’un frère et d’une sœur âgé·es de quatorze et quatre ans. Bien qu’il figure les bombardements à la bombe incendiaire plutôt que la bombe H, il illustre avec une rare acuité les conséquences de la guerre.
9. Point limite de Sidney Lumet (1964)
Victime d’une attaque pour plagiat de la part de Stanley Kubrick, qui était au moment de la sortie du film en pleine post-production de Docteur Folamour (il obtiendra gain de cause et la sortie du film de Lumet sera retadée pour sortir fin 1964 après celui de Kubrick), Point limite est pourtant d’une tonalité toute autre. Sur un mode plus tragique que comique, il part d’une erreur technique déclenchant l’ordre d’atomiser Moscou. Le président des États-Unis (Henry Fonda) va alors tout faire pour arrêter les avions et empêcher le déclenchement d’une guerre nucléaire mondiale.
10. James Bond 007 contre Dr No de Terence Young (1962)
Les films d’action grand public se déroulant sur fond de menace nucléaire sont légion (À la poursuite d’octobre rouge, Le Jour d’après, Broken Arrow, USS Alabama…), mais nous ne pouvions pas clore ce top sans évoquer un opus de la saga James Bond. La franchise a comme beaucoup d’autres (Indiana Jones, Terminator, Star Wars, Mission Impossible), agité l’arme atomique comme la peur ultime dont le célèbre espion doit nous sauver. Dans James Bond 007 contre Dr No, Sean Connery incarne un James Bond qui doit éliminer la société secrète Spectre qui vise à dominer le monde grâce à la bombe.
Bonus série : Chernobyl de Craig Mazin (2019)
Cette mini-série de HBO décrit, avec un degré poussé de réalisme, un sens du suspense et une précision historique l’accident de la centrale soviétique et ses conséquences. Acclamée par le public et la critique, elle raflera tout aux Emmy et aux Golden Globes, tout en étant vivement critiquée par les médias proches du pouvoir russe qui y voient une instrumentalisation politique.
{"type":"Banniere-Basse"}