Un American Pie catapulté dans la jeunesse florentine du XIVe siècle. Erection molle.
On donnerait cher pour passer quelques heures dans le cerveau malade du scénariste et réalisateur David Leland – qui porte le même nom qu’un personnage fou de Twin Peaks –, responsable de cette incommensurable bizarrerie (sur le papier) qu’est Medieval Pie. Soit la rencontre sous Viagra et Salvia (la nouvelle drogue hallucinogène à la mode chez les jeunes Américains) d’un classique de la littérature italienne, le Décaméron de Boccace (déjà adapté par Pasolini en 1971), et de la teen comedy. Produit par Dino De Laurentiis et Tarak Ben Ammar (en soi un gage d’étrangeté), avec un budget colossal pour un film européen (38 millions d’euros !), le film narre, sous une forme chorale, les affres sentimentaux de la jeunesse florentine au XIVe siècle, entre libertinage, mariages arrangés et promesses de virginité, alors que la ville se meurt de la Peste noire. Pasolini, dont on comprend aisément ce qui avait pu l’attirer dans ces contes cruels de la jeunesse obsédés par le sexe et la mort, avait déjà fait le choix profane de mélanger haute et basse cultures, littérature précieuse et érotisme populaire. Bien lui en avait pris. Seulement, ce qui à l’époque pouvait être subversif l’est aujourd’hui beaucoup moins – ou alors eût-il fallu réitérer la monstration d’un sexe masculin en érection. Etrange seulement sur le papier, Medieval Pie est un défilé bas de gamme de seins et fessiers (pas trop, juste un peu de temps en temps, pour réveiller le spectateur alangui), qui ne remplit jamais le cahier des charges que son concept attrayant (American Pie au Moyen Age, pourquoi pas ?) laissait augurer, à tel point qu’on se demande ce qui l’amène sur nos écrans alors que tant d’excellentes comédies restent invisibles. La chair, à défaut de s’y faire triste (c’est bien le moins), s’y fait molle, sans enjeux véritables, largement ringardisée par la crudité des récentes comédies américaines pour adultes sur le même créneau (Farrelly, Apatow…). L’humour n’est guère meilleur. Un beau jeune homme qui se réfugie dans un couvent rempli de bonnes sœurs nymphomanes, après qu’un fossoyeur blaguant sur les pestiférés lui en a indiqué le chemin, cela rappelle nécessairement les Monty Python et leur Sacré Graal. Mais de ce point de vue aussi, le film est un échec, n’arrachant que de maigres sourires de temps à autre. Quant à Hayden Christensen et Tim Roth, il s’en faut de peu pour qu’on voie les dollars de leur cachet se refléter dans leurs yeux… Un coup pour rien.
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Jackie Goldberg
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