Dix ans après son single numero 1 des ventes, Kamini porte à l’écran l’histoire de sa famille pour un résultat un peu épais en bons sentiments.
Marly-Gomont (2006), Bienvenue à Marly-Gomont (2016) ; un clip, un film et, au fond, deux versions radicalement différentes d’une seule et même histoire, celle de Kamini mais surtout celle de l’immigration africaine qui a échappé aux banlieues pour tenter sa chance dans la France profonde.
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Deux versions, d’abord parce que le morceau qui fit connaître l’humoriste-rappeur il y a dix ans racontait sa jeunesse à lui, tandis que le film retrace celle, quelque peu modifiée, de son père, un médecin qui a sué sang et eau pour se faire accepter des habitants du petit bled picard où il venait s’installer, et y est finalement devenu une figure très respectée.
Mais aussi deux versions parce que là où le rap parodique délivrait un propos acide, ricaneur, le passage au cinéma signe un virage très désagréablement pompeux et édifiant, qu’on n’attendait pas du tout de l’humoriste. Kamini a passé ses vaches et sa campagne au kärcher : ce qui reprenait en 2006 le vitriol d’un clip de Groland évoque plutôt aujourd’hui une pub Justin Bridou, défilé de bérets mous et de moustaches propres devant lesquels se joue une fable d’intégration républicaine qui ne manque ni de violons, ni de clichés.
Overdose de pittoresque
Car les clichés, le film n’en a pas peur – même, il ne jure que par ça, et au moins tout le monde est à égalité : d’un côté les cousins africains ultra lookés qui lancent un gospel à la messe de Noël, de l’autre des Picards niveau Deschiens qui lâchent des “vin’diou !” à tout bout de champ et enchaînent les Suze au bistrot du village.
Pourquoi une telle overdose de pittoresque ? Sans doute parce que ça simplifie l’écriture. Le film de Kamini ne laisse à ses personnages que deux choix : un racisme moyenâgeux (à l’arrivée de la famille congolaise au village, on n’est pas loin du “messire, un sarrasin !” des Visiteurs) ou un vivre-ensemble de béni-oui-oui, finalement tout aussi grotesque. Pas d’intermédiaire : c’est le match, écrit d’avance, de l’ignorance contre la vertu, qui ainsi mises dos à dos ne font finalement que se rendre mutuellement service, se renvoyer ad nauseam leur incompatibilité absolue, sans initier la moindre dialectique.
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