Chronique douce et amère de la bourgeoisie US, par le réalisateur du Diable s’habille en Prada.
John (Owen Wilson) et Jenny (Jennifer Aniston) sont mariés, sexy, ont une belle maison, un bon job, trois adorables enfants et surtout – surtout – un brave toutou (le Marley du titre), parce que comme chacun sait, un chien, ça ne vous déçoit jamais (clin d’œil) : vu ainsi, Marley & moi, succès surprise de la fin d’année 2008 aux Etats-Unis, pourrait aisément passer pour un liquoreux éloge de l’american way of life, dans sa version Ricoré/Royal Canin (plat très sous-estimé au demeurant). Sans éviter totalement cet écueil (à la fin surtout), le film séduit par sa capacité à retourner subtilement les chromos qu’il dessine pour en montrer la facticité, ou du moins l’usure, comme cette image récurrente, et de moins en moins enchanteresse, de la petite famille heureuse encadrée derrière une vitre. Le tour de force de Marley & moi est ainsi de contaminer insidieusement la comédie par le mélodrame, sans jamais faire tout à fait advenir ce dernier. Couvrant une quinzaine d’années (de la naissance à la mort du clébard), le film multiplie les scènes à la tonalité douce-amère, où les personnages, qu’on ne voit jamais vieillir à l’écran, se demandent si leurs choix de vie sont les bons, mais se révèlent incapables d’en faire d’autres, embarqués malgré eux sur un rail de convenances, du genre qui vous fait acheter une Rolex à 50 ans. Une scène, parmi d’autres : préoccupé pour la sécurité des siens après une agression de la voisine, Owen Wilson (excellent, tout comme sa partenaire Jennifer Aniston) décide de déménager dans un quartier chic de Miami ; au plan suivant, on survole le quartier en question, avec ses riches pavillons et ses piscines parfaitement alignées, le bonheur à portée de main au son désenchanté du Lithium de Nirvana… mais dépouillé de ses guitares, dans une sirupeuse version easy-listening. Voilà le genre d’ironie, piquante plus que mordante – ce n’est pas un reproche, au contraire –, à laquelle se livre ici David Frankel (Le diable s’habille en Prada). Ses penchants mièvres (et un poil réac) prennent malheureusement le dessus dans un dernier quart raté, lorsque le petit couple et leur chien à l’agonie quittent les plages laid-back de Floride pour les collines enneigées de la Pennsylvanie. On ne devrait jamais troquer ses tongs pour des charentaises.
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