Le cinéaste-pornographe est viré par sa copine. S’ensuivent des situations où se mêlent fantaisie, drôlerie et poésie.
Lorsque Raphaël Siboni choisissait, en 2012, d’intituler son documentaire sur HPG Il n’y a pas de rapport sexuel, il ne pouvait choisir meilleur titre : toute l’œuvre, désormais conséquente, du cinéaste performeur s’articule en effet autour de cette question, de savoir ce qui se joue lorsque deux personnes décident de faire l’amour. Avec un bel art du contrepied, son dernier film, Marion, aurait aussi bien pu s’intituler Il n’y a de rapport que sexuel, puisqu’on y suit, une heure durant – un format inhabituel mais revigorant –, le cinéaste-pornographe en personne aller “de chatte en chatte”, pour paraphraser le personnage éponyme, cette Marion cocue dans la bouche de laquelle ce commentaire n’est pas, on l’imagine, une louange.
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A la rue après s’être fait poisser, le grand chauve erre, enchaînant les rencontres hasardeuses avec des femmes qui questionnent son désir et le leur. Au nombre de cinq, celles-ci acceptent ainsi, les deux jambes en l’air, de jouer les sparring partners de leur picaresque amant. Picaresque et burlesque : on ne dira jamais assez sa drôlerie, qu’il se lance dans une explication vaseuse de sa mathématique du remords, ou qu’il courre, quéquette à l’air, poursuivi par ou poursuivant son prochain, tel un Hardy hardeur – à noter que si c’est la version soft qui sort en salle, une version explicite est diffusée sur Canal+ qui a, seule, financé le projet comme un porno, chichement donc.
Le dépouillement dont fait ici preuve le cinéaste n’empêche ni la fantaisie (tout est permis, de l’adresse au spectateur à l’invention en direct d’une fausse fin pour dépasser l’heure de métrage), ni l’élégance (ballet aquatique, ronde nocturne), ni surtout la poésie. Ainsi, par ce geste solitaire, modeste et néanmoins éclatant, qui peut rappeler Vincent Gallo ou João César Monteiro, deux irréductibles érotomanes bricoleurs, HPG s’affirme comme un des grands modernes de notre temps.
Marion de HPG, avec lui-même, Gwenaëlle Baïd (Fr., 2018, 1 h 02)
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