Hong-Kong, Londres, Paris, et retour à Hong-Kong. Maggie Cheung est de partout, et elle est magique : l’actrice-star est à l’écran comme elle est « dans la vie » dans Clean d’Olivier Assayas. Elle nous a parlé longuement de sa vie et ses engagements.
Par Jean-Marc Lalanne Photo Philippe Garcia
Avant de devenir la plus hexagonale et familière des actrices chinoises, Maggie Cheung a d’abord été pour les cinéphiles un astre lointain, une étoile mystérieuse propice à l’adulation. Longtemps, aucun de ses films n’était visible en France, et on se repassait des VHS en import des plus beaux d’entre eux : As Tears Go By, Nos années sauvages et Les Cendres du temps de Wong Kar-wai, le magnifique Center Stage de Stanley Kwan, Song of the Exile d’Ann Hui… Tandis que ces films sortaient finalement en salle et que le grand cinéma asiatique des années 80/90 dont elle avait été l’un des plus beaux joyaux attisait enfin la curiosité cinéphile mondiale, Maggie Cheung s’installait à Paris et tournait en France pour Olivier Assayas (Irma Vep, 1996) ou Anne Fontaine (Augustin, roi du kung-fu, 1999). Enfin, le triomphe d’In the Mood for Love achevait d’en faire une actrice reconnue également en Occident.
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La vie de Maggie Cheung est comme sa carrière, faite de zigzags et de grands virages. Née à Hong-Kong, elle s’installe à 7 ans à Londres et ne revient que dix ans plus tard sur sa terre natale pour des vacances d’été. Très vite, l’opportunité se présente de devenir mannequin et elle décide de rester loin de sa famille dans une ville où elle ne connaît plus personne. A 19 ans, elle tourne son premier film, une comédie romantique avec Leslie Cheung, qui est un succès. L’année suivante, Jackie Chan la choisit pour être sa fiancée dans Police Story, qui fait un carton. Dès lors, elle devient la petite fiancée de la Chine, la girl next door idéale dans des comédies d’action grand public (six films avec Jackie Chan). Mais, à 24 ans, elle rencontre Wong Kar-wai qui lui propose le rôle féminin principal de son premier film, As Tears Go By. On découvre que la ravissante starlette est aussi une actrice intense et profonde. S’enchaînent alors, entre 1988 et 1994, les grands rôles de la maturité avec les cinéastes les plus prestigieux d’un cinéma de Hong-Kong au faîte de sa créativité. Depuis Irma Vep, Maggie Cheung tourne peu, et seulement des projets qui lui tiennent vraiment à cœur. Dans Clean, elle incarne un personnage d’ex-junkie en reconstruction avec une finesse et une sensibilité remarquables. Son interprétation lui a déjà valu le Prix d’interprétation du dernier Festival de Cannes. Elle revient aujourd’hui sur l’aventure Clean, parle de l’état du cinéma de Hong-Kong après la crise, mais aussi de son engagement politique et humanitaire pour favoriser les progrès de l’éducation en Chine populaire.
ENTRETIEN > Comment Olivier Assayas, huit ans après votre premier film en commun, t’a-t-il proposé Clean ?
Maggie Cheung Après Irma Vep, Olivier avait tourné un tout petit film pour une exposition de la Fondation Cartier intitulée L’Amour. On voyageait en Californie ensemble, il m’a filmée et a monté trois ou quatre minutes de ces images. C’était en quelque sorte notre second film ensemble. Puis, juste avant de tourner Demonlover, il m’a appris qu’il pensait à une histoire pour moi. Il m’a parlé de ce personnage de femme de rock-star un peu trash, qui survit à son mari, qui essaie de décrocher de la came…
As-tu essayé de te documenter sur les rock-stars ? As-tu lu des bios de Yoko Ono, Courtney Love… ?
Pas du tout. J’aurais dû, peut-être… Je ne sais pas. Mais l’écriture du scénario, réaliste, m’a donné envie de trouver le personnage par moi-même. Je ne voulais pas imiter quelque chose d’extérieur à moi tel ou tel modèle d’épouse de rock-star, les signes extérieurs de l’addiction à la drogue… J’ai plutôt essayé de ressentir le personnage, d’être moi à l’intérieur du personnage.
La définition du personnage tient beaucoup à ses vêtements, son bonnet orange, son blouson de cuir…
Oui, dans cette même optique de dépouillement, j’ai décidé, avec l’accord d’Olivier, de porter mes propres vêtements dans le film. Jusqu’à Clean, je n’avais jamais ressemblé au cinéma à ce que je suis dans la vie, peu maquillée, en jean… Arriver sur un plateau, passer cinq minutes au maquillage et être prête pour tourner, ça donne une vraie liberté. Sur In the Mood for Love, la préparation me paraissait interminable.
Clean est donc un portrait de Maggie Cheung…
Oui, il y a beaucoup de moi dans le film, des petites choses… Olivier trouvait dommage qu’il n’y ait pas de film où j’apparaisse telle que je suis dans la vie. Il avait plus envie de voir cette personne réelle à l’écran que la créature sophistiquée d’In the Mood for Love. Dès l’écriture, il avait laissé une porte ouverte pour que j’apparaisse au plus près de ce que je suis.
Clean te permet de jouer dans tes trois langues…
Quand je me mets à parler cantonais, le film devient étrange. On a l’impression de me retrouver dans un film de Hong-Kong… C’est effectivement la première fois que je parle anglais, français et cantonais dans un seul film. Mais ça n’a rien de compliqué pour moi puisque ces trois langues font vraiment partie de ma vie et que je suis habituée à passer constamment de l’une à l’autre.
Es-tu la même actrice en cantonais, en anglais et en français ?
J’ai l’impression d’être la même actrice, mais qui joue différemment selon les langues. Peut-être que je me trompe et que je suis tout le temps pareille (rires)… Mais disons que si je devais tourner Autant en emporte le vent dans une version cantonaise, anglaise, française, je crois que chaque version donnerait une interprétation différente. La langue influe vraiment sur la façon dont on exprime ce qu’on ressent. Dans la vie, je ne me comporte pas de la même façon selon que je parle français ou cantonais.
Emily dans Clean est toujours perçue comme une étrangère. C’est quelque chose dont tu te sens proche ?
Dans ma vie, je suis passée trois ou quatre fois d’une culture à une autre. Je suis née à Hong-Kong dans les années 60, j’ai été une adolescente à Londres dans les années 70, et je suis revenue à Hong-Kong dans les années 80 pour entrer dans la vie active. Hong-Kong avait changé, ce n’était plus tout à fait le monde de mon enfance. Il a fallu à nouveau que je m’adapte. Puis, à la fin des années 90, j’ai choisi de vivre à Paris, de me marier avec un Français, de fréquenter le cinéma français, qui n’a rien à voir avec celui de Hong-Kong. C’était un nouveau dépaysement. Aujourd’hui, je me sens un mix de tout ça. C’est bizarre. Partout où je suis allée, les gens ne m’ont jamais considérée comme une des leurs. Même à Hong-Kong, quand j’ai débarqué à 17 ans. J’avais passé dix ans en Occident, pour eux j’étais une étrangère. Et aujourd’hui, alors que je vis à nouveau à Hong-Kong, mes années passées en France, le type de films que j’ai envie de tourner maintenant, renforcent ce côté « étrangère dans son pays ». C’est bien et c’est pas bien, j’aime ça et parfois je déteste.
Quand tu fais un film de sabre chinois pour le marché international, comme Hero de Zhang Yimou (2003), n’as-tu pas le sentiment que tu l’as déjà fait il y a dix ans ?
A l’époque, c’était très différent. Mon dernier film d’action chinois avant Hero était Green Snake de Tsui Hark (1993). A l’époque, on utilisait encore des câbles pour s’envoler. Il fallait un entraînement physique important pour seulement passer d’un toit à un autre. Aujourd’hui, avec la technologie numérique, on peut sauter d’une montagne à une autre sans effort. Du coup, ça donne une plus grande liberté pour le jeu. On peut se concentrer sur quelque chose de plus intérieur. Quand je tournais avec Jackie Chan, Johnny To, Ringo Lam ou Tsui Hark, je n’étais pas la même actrice. Je ne prenais pas ça sérieusement. Alors que quand je fais Hero, j’ai une autre expérience, je peux tenter des choses plus complexes.
En même temps, Green Snake, L’Auberge du dragon ou The Heroic Trio, c’était mieux que Hero, non ?
Tu crois ? J’aimais beaucoup ce personnage de serpent métamorphosé en jeune fille dans Green Snake, mais, au final, le film m’avait déçue. Hero m’a séduite parce que ça me permettait de dire au revoir aux films d’arts martiaux. Parce que je crois que j’en ai effectivement assez fait comme ça et que je n’en ferai pas d’autres.
Sur un Jackie Chan, tu as eu un accident très grave…
Oui, je me suis ouvert le crâne, j’ai passé des mois immobilisée à l’hôpital. Ça m’a rendue beaucoup plus peureuse dans les films d’action. Et quand on a peur on le fait beaucoup moins bien. Je n’ai plus envie de risquer ma vie pour des films que je fais juste parce que c’est mon travail.
Et chanter, comme tu le fais dans Clean, ça te met en danger ?
Non, que je chante bien ou mal, c’est ma façon de chanter et voilà… Ce n’est pas un risque dont j’ai peur. Au pire, je suis ridicule. J’ai très peu travaillé, je n’ai pas pris de cours de chant. J’aimais beaucoup Mazzy Star. C’est pour ça, je crois, qu’Olivier a pensé à David Roback pour composer les chansons du film.
Comment se fait-il que tu n’aies pas eu de carrière dans la cantopop, contrairement aux autres grandes stars du cinéma asiatique ?
Vraiment, je n’ai jamais eu envie faire de la cantopop. Ça n’apporte rien. Sinon de l’argent, mais au prix de sacrifices énormes. L’industrie musicale à Hong-Kong est terrible, à la fois puissante financièrement et très pauvre en terme créatif. C’est vraiment la loi du gain rapide, avec des pop-stars qui n’écrivent ni ne composent ce qu’ils chantent. La plupart ne jouent pas non plus d’instruments. Ils doivent savoir porter des vêtements, qu’ils n’ont pas non plus choisis. Ils passent tout le temps à la télé, dans n’importe quelle émission, pour vendre n’importe quoi. Il y a vingt ans, quand j’étais un jeune mannequin qui débutait au cinéma, j’aurais peut-être voulu pénétrer cette industrie. Mais mon timbre de voix était trop bizarre pour ce type de musique. Et mes goûts m’ont toujours portée vers quelque chose de plus rock, de plus personnel.
La première fois que tu as chanté, c’est donc sur l’album de Jeanne Balibar, l’an dernier ?
Oui, Jeanne est la première personne courageuse à avoir osé me faire chanter (rires). C’était presque un truc entre copines, vraiment relax. Si le résultat ne nous plaisait pas, on s’était laissé la possibilité de jeter les bandes. Du coup, ça m’a aidée pour Clean. Parce que si j’avais dû directement commencer avec David Roback, j’aurais peut-être flippé davantage. J’aimerais bien chanter à nouveau, peut-être faire un album.
Tu as joué avec Jean-Pierre Léaud et Nick Nolte, Jeremy Irons et Chow Yun-Fat, Jet Li et Darry Cowl. Est-ce que ça demande un réajustement d’être la partenaire d’acteurs si différents, issus de la Nouvelle Vague, de l’Actor’s Studio, du théâtre anglais ou du cinéma d’action chinois ?
Oui et non. J’essaie de ne pas être affectée par mon partenaire. Mais il y a toujours une alchimie qui se met en place sans qu’on la prémédite. C’est vrai que jouer avec Jean-Pierre Léaud, c’est vraiment quelque chose. On ne sait pas trop vers quoi on s’embarque, il invente tout le temps. Nick Nolte, c’est une sorte de Formule 1, il est surentraîné, il a tout préparé et maîtrise le moindre de ses effets. Tony Leung est un acteur très instinctif, avec un jeu assez minimal. Il ne se concentre pas, il trouve en jouant. Avec Jackie ou Jet Li, c’est très physique, donc c’est autre chose…
Pendant dix ans, durant l’âge d’or du cinéma de Honk-Kong, tu as tourné dix ou douze films par an. Est-ce que cette hyperactivité t’a usée ?
En tout cas, je ne crois pas que ça m’ait abîmée. J’ai peut-être été usée parce que j’ai éprouvé à un peu plus de 30 ans le besoin de tout arrêter, de m’échapper de Hong-Kong en acceptant un petit film français dont je ne savais rien (Irma Vep), juste pour que ça s’arrête. Et ensuite, j’ai très peu tourné, et seulement des films que j’avais vraiment envie de faire. Mais pendant ces années de travail intensif, il y a eu de grandes choses, et d’autres films que je faisais simplement parce que la machine était folle. Nos films étaient des succès commerciaux partout en Asie, et surtout dans les marchés extérieurs, Thaïlande, Taïwan, Malaisie… Les noms des stars s’achetaient comme des marques et les films se faisaient à la chaîne, parfois en huit jours. Je tournais trois films en même temps. Si je n’avais pas ralenti il y a dix ans, je serais sûrement abîmée aujourd’hui.
Dans quel état se trouve aujourd’hui l’industrie du cinéma de Hong-Kong ?
D’un point de vue financier, le marché se redresse. Il y a cinq ans, il était tombé au plus bas, mais depuis le début des années 2000, la fréquentation remonte un peu. Un des problèmes principaux est la presse tabloïd, qui contrôle l’industrie des médias, utilise les jeunes starlettes pour vendre les journaux, mais très vite les consume en critiquant leur vie privée, en inventant des scandales. Il n’existe pas de recours juridiques contre eux. Du coup, les jeunes comédiennes sont de plus en plus jetables, et une industrie a besoin de stars. On ne peut pas avoir seulement de bonnes actrices faisant des films d’auteurs passionnants comme Naomi Watts. Il faut aussi des Julia Roberts. Aujourd’hui à Hong-Kong, il n’y a ni l’une ni l’autre. On ne leur laisse pas la chance de grandir ni de trouver ce qu’elles ont envie de faire. Et de toute façon, l’industrie ne produit plus que des films de fantômes et des comédies d’action. Il y a quelques auteurs comme Yu Lik-wai ou Fruit Chan, mais leurs films ont peu d’écho. C’est difficile pour eux.
Il y a vingt ans, certaines personnalités comme John Woo ou Tsui Hark parvenaient à faire de très grands films à l’intérieur des contraintes de cette industrie. Il n’existe donc plus d’équivalents ?
Il y a Johnny To (son nouveau film, le brillant Breaking News, vu à Cannes, sortira l’hiver prochain en France ndlr). Il est un peu le nouveau Tsui Hark. Mais des films comme ceux de John Woo ou Tsui Hark, un cinéma commercial d’un si haut niveau artistique, c’était la première fois que ça se produisait dans l’histoire du cinéma de Hong-Kong, et ça ne s’est pas reproduit depuis. C’était un moment magique, c’est pour ça que je tournais douze films par an. De la poussière d’étoile constellait tout ce qu’on faisait, c’était comme un rêve. Maintenant, le cinéma de Hong-Kong est juste une industrie ennuyeuse. Je vois les nouveaux films dans l’avion, c’est toujours les mêmes recettes et ça n’apporte rien de nouveau.
Tu es toujours impliquée dans la défense du droit à l’image à Hong-Kong ?
Non, le marché chinois est trop vaste. Récemment, un ami m’a téléphoné en me prévenant qu’une boutique en Chine continentale vendait des produits cosmétiques et des vêtements en utilisant mon nom avec une orthographe différente. Je n’ai plus l’énergie pour me battre contre ça. Aujourd’hui, je me concentre sur autre chose dont je ne verrai sûrement pas les résultats de mon vivant : l’éducation en Chine. Sur le continent, beaucoup de Chinois entre 20 et 40 ans ne sont jamais allés à l’école dans les campagnes.
Comment procèdes-tu ?
J’organise des ventes de charité, je démarche des entreprises, je collecte de l’argent. On a déjà fait construire trois écoles dans des petits villages de Chine. Je concentre particulièrement mon attention sur l’éducation des filles. Elle est encore plus faible que celle des garçons. Les familles démunies choisissent toujours de scolariser plutôt leurs garçons que leurs filles. C’est une culture fondée sur la domination masculine, et il n’y a pas de raisons que ça évolue si les filles n’ont pas l’opportunité de faire des études.
Tu te déplaces dans ces villages chinois ?
Oui, régulièrement. Beaucoup de Chinois vivent tranquillement dans leurs villages en ignorant que leur pays se transforme à toute allure, se développe économiquement. La plupart des habitants ne sont pas préparés à une évolution aussi rapide. L’exclusion est terrible. Des hôtels Four Seasons poussent partout comme des champignons, mais la majorité de la population ignore les mécanismes de l’économie mondiale. Il faut transmettre ces outils pour que le développement économique se produise dans des conditions saines. Et ce n’est vraiment pas le cas aujourd’hui.
Pourquoi, contrairement à ce qui était prévu, tu n’apparais pas dans 2046, le dernier Wong Kar-wai ?
J’ai fait des essais de costumes et de maquillage. A chaque fois, Wong Kar-wai me filmait. Je devais tourner en août et septembre 2003. Début octobre, Wong Kar-wai n’était toujours pas prêt. Je lui ai dit que je devais partir sur le tournage de Clean. Il m’a demandé de rester huit jours de plus. J’ai refusé. Après Clean, je n’avais plus envie de retourner sur le tournage, qui n’était évidemment pas terminé. J’avais des priorités personnelles, et j’espère qu’il l’a compris.
Ce rendez-vous manqué marque-t-il la conclusion de ta collaboration avec Wong Kar-wai ?
J’espère que ce n’est pas si grave. A l’époque où j’ai enchaîné plusieurs films avec lui, ma vie était moins compliquée. Je vivais à Hong-Kong, je pouvais supporter qu’il tourne pendant un an dans la plus totale improvisation. J’étais disponible. Les quinze mois de tournage d’In the Mood for Love ont vraiment détérioré ma vie privée. Je ne veux plus que ça se reproduise. J’aimerais beaucoup retravailler avec Wong Kar-wai, mais je n’ai plus l’âge de gâcher ma vie pour des films. J’ai d’autres priorités.
Et tu as vu 2046 ?
Oui, c’est très beau. Mais je crois qu’il a manqué de temps. Le film qu’on a vu pendant le Festival de Cannes n’est pas fini. J’espère qu’il l’a repris après. Pour l’instant, il y a deux histoires en une et il lui reste à les connecter l’une à l’autre. Alors ce sera sûrement un grand film.
Tu as eu de nombreux awards en Asie, mais le Prix d’interprétation à Cannes pour Clean est ton premier prix en Occident…
Non, j’avais reçu le Prix d’interprétation à Berlin pour Center Stage de Stanley Kwan. C’était en 1992. Déjà douze ans ! Je n’arrive pas à y croire… Je tournais Police Story 3 avec Jackie Chan en Malaisie et je n’étais pas venue le chercher. Ça m’avait fait plaisir mais sans plus. Pour Clean, j’étais à Cannes depuis la présentation du film, j’ai suivi son accueil. Tout a été intense, et ce prix était la conclusion heureuse de quatre jours très forts.
Qu’en est-il de ta carrière hollywoodienne ?
Hier soir, j’ai eu des nouvelles du projet Memoirs of a Geisha (il y a six ans, Steven Spielberg envisageait de tourner ce film avec Maggie Cheung, mais le projet a par la suite été abandonné ndlr). C’est finalement Rob Marshall qui fait le film et il a choisi Michelle Yeoh. Pendant toutes ces années où je disais régulièrement que je n’avais pas vraiment envie d’une carrière à Hollywood, je me rends compte aujourd’hui que je ne me mentais pas. A force de répéter la même chose, on finit par douter, on se demande si on pense tout à fait ce qu’on dit. Et vraiment, que ce film se fasse sans moi ne me blesse pas, et je suis même contente pour Michelle .
Tu es venue à Paris en 1995, parce que ton statut de star dans toute l’Asie commençait à te blesser. Maintenant, même en Occident, on te reconnaît dans la rue, non ?
A Paris, quand les passants me reconnaissent dans la rue, ils sont cool. Ils se disent « Tiens, Maggie Cheung » et ils continuent leur conversation. Ce n’est pas la même pression que d’arriver à Hong-Kong dans des lieux publics et de lire dans le regard des gens « Elle est moche, elle est grosse, elle est vieille, elle a des boutons ». A Paris, les gens qui m’accostent me remercient d’avoir fait ce que j’ai fait. A Hong-Kong, ce n’est pas dans la culture de remercier les acteurs. On les lapide pour leur faire payer leur argent, leur célébrité… Maintenant, depuis mon divorce, ma base est à nouveau à Hong-Kong. Alors, plus que jamais, Paris est pour moi une façon de m’échapper, de respirer. ||
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