Au premier abord, on trouve ce film poseur, dérisoire. Mais, passée la première (mauvaise) impression, on se doit de reconnaître que Denis Villeneuve est plutôt un meilleur suiveur d’Atom Egoyan que d’autres cinéastes canadiens (comme Robert Lepage ou Denys Arcand) : images bleutées, décors modernes et cliniques, enchevêtrement de niveaux narratifs, intervention récurrente du hasard […]
Au premier abord, on trouve ce film poseur, dérisoire. Mais, passée la première (mauvaise) impression, on se doit de reconnaître que Denis Villeneuve est plutôt un meilleur suiveur d’Atom Egoyan que d’autres cinéastes canadiens (comme Robert Lepage ou Denys Arcand) : images bleutées, décors modernes et cliniques, enchevêtrement de niveaux narratifs, intervention récurrente du hasard dans l’enchaînement des événements. Au sein de cette mini-école formaliste, Villeneuve se distingue par sa façon bouffonne de perturber constamment le grave ordonnancement de son drame chicos. D’abord en alternant des cadrages maniaques dignes de Greenaway et un filmage saccadé n’importe comment. Ensuite, en introduisant et en ponctuant le récit de monologues grotesques de poissons bouffis et sanguinolents qui, avant de se faire trancher la tête par une sorte d’homme préhistorique, énoncent des commentaires pseudo-philosophiques sur les personnages. Complètement inutile et complètement idiot, mais ça ajoute de la distanciation à la gravité de l’héroïne, sorte de zombie riche et branchée, héritière d’une chaîne de magasins de vêtements qui, après un avortement traumatisant (et très détaillé), traîne son spleen en faisant un peu n’importe quoi, baisouille, dansouille dans des boîtes, écrase du poisson (tiens) puis un piéton, sans trop sourciller sur le coup, tente de se suicider. Par ailleurs, on note une utilisation un peu sarcastique de la musique : rengaine pince-sans rire de Tom Waits au moment de l’accident, flonflons guillerets d’un vieux Aznavour pendant les passages dépressifs’ Il y a aussi des sortes de marabout-de-ficelle biscornus. Ainsi, quand dans un restau asiatique, l’héroïne mange un poulpe « qui ne tient pas la route« , on remonte la filière de proche en proche jusqu’à ce qu’on découvre que le produit est mauvais parce que le spécialiste du poulpe a été renversé par une auto, conduite par l’héroïne. Ce jeu de l’oie n’est pas franchement captivant, mais au moins il est intrigant et fantasque.
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