Pourquoi Stacy Title fait-elle du cinéma ? Elle aurait pu faire autre chose de sa vie : vendeuse de chichis sur la plage, pom-pom girl pour le F. C. St-Leu, membre du service d’ordre de la Samaritaine, designer de pin’s, agent de saisie pour le bottin téléphonique. Malheureusement, elle a réduit cet éventail de possibilités […]
Pourquoi Stacy Title fait-elle du cinéma ? Elle aurait pu faire autre chose de sa vie : vendeuse de chichis sur la plage, pom-pom girl pour le F. C. St-Leu, membre du service d’ordre de la Samaritaine, designer de pin’s, agent de saisie pour le bottin téléphonique. Malheureusement, elle a réduit cet éventail de possibilités au strict minimum pour se concentrer sur une hypothétique carrière de cinéaste. On pourrait espérer du cinéma qu’il attire les meilleurs et, au pire, les moins mauvais. Stacy Title joue dans une autre catégorie : les bras cassés.
Animés par un sens aigu de la justice, deux femmes, un wasp, un juif et un Noir invitent à leur table la lie de la terre : un macho défendant les violeurs, un GI fasciste, un prêtre intégriste, un chef d’entreprise esclavagiste, pour ensuite s’en débarrasser en les empoisonnant. Stacy Title marche manifestement sur les plates-bandes de Capra et d’Arsenic et vieilles dentelles. Le comique de Capra se fondait sur la mise en scène et sur une utilisation très originale d’un espace clos. L’Ultime souper repose au mieux sur quelques bons mots : pour le reste, c’est Au théâtre ce soir. On pose la caméra dans un coin, champ-contrechamp, le chef-op règle les lumières, et roulez jeunesse ! L’argument de L’Ultime souper est le même que celui de Dead zone de David Cronenberg. Que se passerait-il si l’on rencontrait Hitler en 1924, en ayant l’intuition des atrocités qu’il va commettre ? Faut-il s’en débarrasser, quitte à se sacrifier au profit de la collectivité ? Laisser tomber en se disant que rien n’est écrit d’avance ? Dans Dead zone, Cronenberg répondait à la question de manière positive, faisant du don de voyance de Christopher Walken une métaphore de l’artiste dont la prescience était mise au ban de la société. Moins ambitieux, le projet de Stacy Title pédale dans la choucroute. Son histoire de cinq yuppies américains gangrénés par le politically correct se perd dans une réflexion vaseuse sur les contradictions de la gauche américaine et la validité de la peine de mort. Elle vise l’impertinence, mais à force de trop vouloir stigmatiser la bêtise de ses personnages principaux en les rapprochant de plus en plus des abrutis qu’ils invitent à leur table, elle finit par livrer un film démonstratif et réactionnaire.
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