Après un début de festival très chaud, la fiction gagne des terres lointaines : zones borderline, en marge du monde social, voire aux confins de l’humanité.
Après un début de festival très chaud (zombie dead fucker chez Bruce Labruce, harem ado et lesbien chez Bonello, amours gays chez Honoré), il semblerait que la fiction ait quitté son biotope érotique pour gagner des terres lointaines : zones borderline, en marge du monde social, voire aux confins de l’humanité.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Deux réalisatrices au moins ont vu dans la marginalité (sociale, symbolique) un terreau propice à l’émergence de romanesque. A commencer par Isild Le Besco, dont le troisième long-métrage a provoqué l’émoi parmi les festivaliers. Inspiré d’un fait divers, Les Bas-fonds raconte la vie en autarcie de trois jeunes filles, sœurs ennemies et amantes sado-masochistes, dont le mode de vie déréglé finira par conduire au crime.
Selon un dispositif quasi théâtral, Le Besco filme un territoire dont le travail de civilisation se ferait à l’envers, amenant les corps jusqu’à une forme extrême de sauvagerie. Si la deuxième partie du film (procès, vocation religieuse) est malheureusement rattrapé par un surplomb moral, Les Bas-fonds n’en reste pas moins une expérience de cinéma assez inédite, où chaque réflexe animal s’offre comme une performance sur le corps et le langage.
Jeunesse maléfique dans « La Lisière »
Parfois, vivre selon ses règles propres n’annule pas forcément le lien social, mais prolifère en deçà : c’est le cas dans le premier film de Géraldine Bajard, où un groupe d’adolescents prend peu à peu le pouvoir dans une petite communauté de province, sous le regard médusé d’un jeune médecin (Melvil Poupaud).
A partir de références identifiables (Le Village des damnés, Le Ruban Blanc), La Lisière invente sa propre jeunesse maléfique : préférant la nuit défaite au jour laiteux, la nature indomptée aux lignes trop graphiques d’une « ville nouvelle » où se meut une petite bourgeoise autosatisfaite. Bajard pousse la critique sociale (la morbidité adolescente comme symptôme des névroses adultes) vers les rives du fantastique, « à la lisère » des genres, signant l’un des temps forts et formidablement inquiétant de ce festival.
{"type":"Banniere-Basse"}