Little Big Man jouit d’une flatteuse réputation de fresque épique et de démythification à tout-va. Ses limites sont pourtant évidentes. Surtout si on compare Arthur Penn aux autres cinéastes américains qui ont affronté le western dans les années 70. Dépourvu de l’âpreté de Don Siegel comme du génie visionnaire de Peckinpah, moins malin qu’Altman et […]
Little Big Man jouit d’une flatteuse réputation de fresque épique et de démythification à tout-va. Ses limites sont pourtant évidentes. Surtout si on compare Arthur Penn aux autres cinéastes américains qui ont affronté le western dans les années 70. Dépourvu de l’âpreté de Don Siegel comme du génie visionnaire de Peckinpah, moins malin qu’Altman et moins lyrique qu’Eastwood, Penn se contente de mettre ses pas dans ceux du Maître (Ford) et de ses dignes successeurs (Fuller, Mann, Daves, Aldrich) afin de vulgariser une entreprise commencée bien avant lui.
Les Indiens ne l’avaient pas attendu pour s’humaniser et on savait déjà que les Blancs avaient été infâmes. Little Big Man se réduit donc à la pose de quelques implants vite frappés d’inutilité : la performance d’acteur (Hoffman, qui ne s’est pas arrangé depuis), le comique de cabaret new-yorkais (la line qui tue) et la grivoiserie facile (insupportable pour quiconque se souvient de Debra Paget dans La Flèche brisée).
Face à un matériau qui avait déjà été poussé dans ses ultimes retranchements par son meilleur serviteur (voir Les Deux cavaliers et Les Cheyennes), Penn joue la carte de la parodie sans jamais atteindre le grotesque. Et quand il cite La Chevauchée fantastique ou La Prisonnière du désert, il fournit lui-même les verges pour se faire battre, tant ses modèles contenaient déjà leur part de doute tapie au sein de leur perfection formelle. Alors que Little Big Man est moche et sûr de lui. Très faible dans sa déclinaison des avatars de l’homme de l’Ouest (le puritain, l’ivrogne, le tueur, le commerçant, le trappeur), le film devient plus intéressant quand le héros est indien. Parce que Penn oublie un peu de salir des vignettes déjà froissées pour se laisser fasciner par un paysage immémorial. Mais ça ne dure pas. Le message écrit en gras doit passer coûte que coûte, le « politiquement correct » avant la lettre et la bonne conscience du libéral doivent l’emporter. Les méchants Peaux-Rouges se sont donc transformés en bons Indiens. Ils continuent pourtant de parler anglais. Kevin Costner saura s’en souvenir et achèvera le cycle hollywoodien culpabilité-respect en rendant leur langue à ses Sioux. Mais la breloque ethnique et la verve bien-pensante ne nous feront jamais oublier le regard de Natalie Wood quand John Wayne la soulevait de terre. Tout était déjà dit. Et tellement mieux montré.
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