Sébastien Laudenbach (“La Jeune fille sans mains”) et Chiara Malta, autrice d’une trilogie de courts métrages sur l’enfance et d’un long documentaire (“Armando et la Politique”) réalisent un film à la joyeuse effronterie, aussi drôle qu’émouvant.
Comme toutes bonnes screwball comedies, celles où les portes claquent et les mots fusent, Linda veut du poulet débute par un quiproquo. Paulette croit sa fille Linda, huit ans, à l’origine de la disparition de sa belle bague d’émeraude, offerte par son amoureux défunt, père de la fillette.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Mais Paulette se trompe, punit injustement Linda, et pour racheter sa faute, elle lui promet d’exaucer l’un de ses souhaits, qui n’a l’air de rien : la préparation d’un poulet au poivron. De ce secret proustien (le poulet rappelle à Linda le souvenir d’une époque inconnue, grand mystère émotionnel du film), le duo tire un film d’aventures joyeusement foutraque.
Brouhaha mélodieux
En inscrivant leur récit un jour de grève dans un quartier populaire insituable, mais reconnaissable par son architecture, immobilisant le pays et rendant la tâche de Paulette et Linda peu aisée, les cinéastes reprennent à leur compte le principe du jeu du chat et de la souris (à tel point qu’à la fin on ne sait plus vraiment qui court après qui) pour brosser le portrait optimiste et généreux d’une France intrinsèquement mixte dans un film choral aux airs de comédie musicale.
Linda veut du poulet fait alors l’effet d’un grand brouhaha mélodieux, maîtrisé et ondulant, dans lequel se précipitent quantité de personnages secondaires (des flics à vélo, une grand-mère, une sœur râleuse et beaucoup d’enfants), tous·tes engagé·es d’une manière ou d’une autre vers cette quête absurde qui n’est pas sans amertume (on aurait parié que le poulet serait épargné, seule ombre au tableau de cette grande utopie que le film embrasse).
Chalut collectif
Avec ce chahut collectif mené par ces fines silhouettes de papier très incarnées (les voix de la petite Mélinée Leclerc, de Clotilde Hesme, Laetitia Dosch ou encore Estéban), Linda veut du poulet fait vœu de désobéissance. Il trouve, dans le détail minimaliste qui consiste à accorder à chaque personnage une couleur qui lui est propre, le trucage limpide pour dire son ambition esthétique et politique : l’attention à la singularité de chacun·e vaut comme une attention à tous·tes.
Linda veut du poulet de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach
{"type":"Banniere-Basse"}