Un sommet inégalé du fantastique années 30.
Avant de donner au cinéma la plus belle relecture de Mary Shelley (La Fiancée de Frankenstein), Whale porta H. G. Wells à l’écran et inaugura par son succès un filon d’ersatz qui étirèrent sur près de vingt ans la trajectoire de l’homme invisible chez Universal, jusqu’à la rencontre avec les affreux Abbott et Costello dans une exploitation terminale de la première manière, dont plus rien ne subsistait alors de la grâce sardonique. Perdue au fil des décalques, cette façon légère de broder du métaphysique dans les images congrues d’une banalité – un vélo lancé sans passager, une porte qui claque… Egarée, l’élégance mutante de ce visage couvert de bandelettes qui dans le dénudement se fait tête de mort, momie à lunettes, corps sans tête – stupéfaite, sa logeuse s’exclame : “Il est tout rongé !” Oubliée enfin, l’éblouissante maîtrise de sa mise en son, enluminée par la distinction rugueuse des accents de Claude Rains. Le parlant n’avait pas cours depuis dix ans, mais Whale savait déjà la voix off intouchable lieu du pouvoir. Pour son protagoniste finalement abattu, reparaître revenait à passer du off au in, d’une ubiquité théorique à la claustration du gros plan, de la toute-puissance au statut de mortel.
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