Lutte entre royaumes au IIIe siècle en Chine. Grand Spectacle fougueux où un John WOO régénéré ménage de belles échappées poétiques.
En 208 après J.-C., l’empereur Han Xiandi règne sur une Chine divisée. L’oncle de l’empereur, Liu Bei, à la tête du royaume de Shu, envoie son conseiller militaire, Zhuge Liang, au royaume de Wu pour former une coalition… Adapté d’un classique de la littérature chinoise (de Luo Guanzhong), Les Trois Royaumes marque le retour en fanfare de John Woo en Chine, où il n’avait pas tourné depuis plus de quinze ans. Cette fresque au budget pharaonique permet au cinéaste de s’engouffrer dans la brèche commerciale ouverte par Ang Lee et Zhang Yimou avec leurs grands spectacles historico-épiques s’inspirant de la tradition du cinéma d’arts martiaux de Hong Kong… Seule différence, essentielle : John Woo a lui-même fait ses premières armes chez les Shaw Brothers à Hong Kong comme assistant de Chang Cheh, maître du genre. Il ne débarque donc pas comme un touriste et n’a pas besoin de récapituler le genre comme Ang Lee, ni de le sur-décorer comme Zhang Yimou.
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Retrouvant la poésie du wushu, Woo enrichit la dimension martiale avec des subtilités inattendues. Certes, il ne résiste pas au morceau de bravoure numérique quand il montre le point de vue d’une blanche colombe (autocitation) survolant les bateaux ennemis positionnés devant la Falaise rouge – où aura lieu la grande bataille. Mais il se singularise surtout avec des digressions inattendues, notamment des séquences musicales : celle où le vice-roi Zhou Yu (Tony Leung), un des personnages principaux, accorde la flûte d’un berger qui n’est pas parfaitement juste ; ou celle où il jauge le conseiller militaire en l’affrontant dans une joute de cithare qui frise la cacophonie. Ces épisodes annexes expriment autant la sensibilité esthétique que la combativité des héros, et contrebalancent des numéros plus évidents, comme le méga-incendie de la flotte de l’empereur. Même là, Woo marque des points – lorsqu’il montre l’attente du vent dont dépend l’issue de la bataille. Le spectacle est aussi chargé que chez ses concurrents, mais Woo les dépasse par sa maîtrise de l’action pure, par la frénésie sensuelle de ses combats. Enfin, signalons que la mouture à laquelle nous avons droit est le bonsaï de la version chinoise de 4 h 40, sortie en deux parties. On a estimé, comme souvent, que le public occidental serait dés-orienté par les circonvolutions d’un mythe historique que tous les Chinois connaissent par cœur. Peuh !
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