Un film d’auteur déceptif puisqu’en lieu et place du grand film culturel qui lui était commandé, Téchiné signe une variation très personnelle sur la désolation.
Le projet est presque mensonger : au moins autant que des sœurs Brontë (Emily Adjani, Anne Huppert et Charlotte Pisier), il s’agit du frère, Barnwell (introducing Pascal Greggory), peintre et poète, et en particulier de sa liaison passionnée et malheureuse avec Mme Robinson (Hélène Surgère, excellente). Les rumeurs de crêpage de chignon sur le plateau et d’amputation par la production Gaumont (à propos, quand verra-t-on enfin la version intégrale ?) ont fait beaucoup pour la légende maudite du film.
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Vingt-cinq ans après, il frappe non seulement par sa splendeur visuelle mais surtout par sa signature d’auteur. Tout comme les sœurs Brontë étaient en butte au conformisme de leur époque, André Téchiné a refusé de tourner le grand film culturel qu’on lui avait commandé, éliminant toutes les grandes scènes mélodramatiques auxquelles le sujet aurait pu se prêter.
Dans la logique du rigorisme anglican des trois sœurs, Téchiné joue la carte de la désolation : désolation de la lande irlandaise aussi bien que des visages de tragédiennes de ses interprètes. Aujourd’hui, on qualifierait un tel film de « déceptif » en ce sens qu’il n’offre pas ce à quoi on s’attendait, mais nous emmène ailleurs, un ailleurs plus austère mais pas moins captivant.
Par ailleurs, pour les amateurs de jeux proustiens avec le kaléidoscope du temps, Pascal Greggory a retrouvé Marie-France Pisier dans… Le Temps retrouvé, Isabelle Adjani dans La Reine Margot et Isabelle Huppert dans La Vie promise.
Olivier Nicklaus
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