Découvrez sans plus attendre toutes nos critiques des sorties cinéma de la semaine.
Cette semaine, un vent de contestation s’empare des salles obscures grâce aux Graines que l’on sème et Un Peuple. Mais au-delà de cette sélection éminemment politique, on pourra se reposer en regardant La Nature et rire un bon coup devant la nouvelle adaptation d’une BD de Fabcaro.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
La Nature d’Artavazd Pelechian
Comme chez Lucrèce, La Nature est un poème que compose un assemblage, celui d’images glanées dans des fonds d’archives et sur internet, devenu une infinie vidéothèque. Mais Pelechian l’ancien (84 ans) n’est pas seulement, à l’école de Dziga Vertov, le coordinateur-monteur d’images, de musiques et de sons produits par d’autres. Son geste, nettement plus virtuose, est d’emblée artistique : coups de pinceau, de brosse ou de balai, il passe toutes les images au noir et blanc, comme un continuum d’eaux-fortes destiné à conjurer le risque d’une distraction par la couleur. Par Gérard Lefort
Lire notre critique
À nos enfants de Maria de Medeiros
À nos enfants fonctionne sur un maillage de conflits qui aurait pu annoncer un film mécanique et lourd. C’est justement à partir de ce jeu d’oxymores déployé à tous les étages de la narration et de sa mise en scène que Maria de Medeiros parvient à élaborer une riche observation généalogique du féminin et de la société brésilienne. Par Marilou Duponchel
Zaï Zaï Zaï Zaï de François Desagnat
Zaï Zaï Zaï Zaï est certes très loin des produits les plus préformatés dont ce marché a accouché. Mais son décalque d’une BD qu’il reprend pourtant presque au mot près, avec une seule modification d’importance (le héros n’est plus bédéaste mais comédien), n’accouche jamais que d’un ersatz, un nonsense surécrit aux accents quelque peu théâtraux et fabriqués, qui, selon les scènes, marche parfois totalement et parfois pas du tout – en tout cas jamais comme son modèle. Par Théo Ribeton
Les Poings Desserrés de Kira Kovalenko
Dans son bled industriel ruiné, Ada (sublimissime Milana Aguzarova) est au centre de tous les mouvements de survie, en symbiose avec les mouvements de la caméra. Quand elle va vite, l’image se met à courir. Lorsqu’elle s’arrête dans son indicible quant-à-soi, l’image fait une pause. Fille courage d’un fin fond du Caucase, Ada se démène entre un père traditionnellement tyrannique et ses deux frères : Akim, adolescent en surplace, et Dakko revenant de Rostov, hypothétique eldorado. Des garçons cabossés, un père malade, tous sympathiques par instants, mais fondamentalement dominants. Par Gérard Lefort
Un Peuple d’Emmanuel Gras
Entre l’incompréhension des violences policières, véritables scènes de guerre, les luttes et désenchantements internes que subissent les différents membres, le film a beau être prenant, passionnant à plusieurs moments (seul véritable sommet esthétique, un long et sidérant travelling capte l’ensemble des vitrines défoncées des Champs-Élysées), il laisse hélas trop souvent l’impression de demeurer dans le confort de l’immense matière qu’il saisit. Par Ludovic Béot
Les Graines que l’on sème de Nathan Nicholovitch
Construit sur une succession de long discours filmés en temps réel de toute une communauté qui rendent hommage à la défunte, Les Graines que l’on sème va, dès lors, explorer l’onde de choc que provoque cette disparition, puis comment ce raz-de-marée d’injustice va générer et structurer une pensée politique au sein de cette jeunesse. Par Ludovic Béot
Compagnons de François Favrat
Une jeune femme issue de la diversité, impliquée dans un trafic de drogue, est prise sous l’aile d’une “mère” et d’un Compagnon du devoir qui vont la remettre dans le droit chemin. On a beau le livrer aussi platement que possible, voilà un programme qui fleure bon le film de rééducation. Ou comment l’artisan grincheux, dépositaire de nos franchouillardes traditions, façonne et élève la gamine des cités réfractaire, moyennant quelques prises de bec et beaucoup de leçons de vie circulant soi-disant à double sens. Par Emily Barnett
La Légende du roi crabe d’Alessio Rigo de Righi et Matteo Zoppis
La Légende du roi crabe est une splendeur, qui se soucie moins de précision ou d’originalité scénaristique que de flamboyance formelle, sans toutefois s’abîmer dans la pompe. Rigo de Righi et Zoppis, aidés de leur brillant chef opérateur Simone D’Arcangelo, s’emploient à sublimer chaque visage, chaque grain de peau en miroir à la matière naturelle qui les entoure : rivières, lacs, champs, montagnes, pierres, bois, que vient frapper une lumière toujours émouvante. Le film est ainsi empreint d’une physicalité rare, à la fois imposante et délicate, qui rend toute chose hyper présente sans écœurer. Par Jacky Goldberg
Ils sont vivants de Jérémie Elkaïm
Le résultat est un peu bancal, flottant, indécis. Le scénario et la mise en scène oscillent en permanence entre diverses manières de tracer le récit. Comme les soldats dans les vieux films de guerre quand ils pénètrent dans un champ de mines, on a un peu l’impression qu’Elkaïm, parti en éclaireur, tâtonne le terrain pas à pas avec pusillanimité, sondant la terre de la pointe de son couteau, et en oublie de regarder un peu au loin. Trop près du terrain, trop préoccupé par ce qu’il prend pour des bombes à éviter absolument (le sentimentalisme, la bienveillance pour les migrant·es, la leçon de morale aux racistes, etc.) qui ne sont que des pétards mouillés, son film manque de vision d’ensemble, d’un regard un peu distancié et surtout franc. Par Jean-Baptiste Morain.
Selon la Police de Frédéric Videau
« À l’image du très beau personnage de flic joué par Patrick d’Assumçao, qui brûle son insigne dès la première scène du film, la police est montrée à bout, esseulée, ayant pour seule amie une pluie qui suspend un instant la criminalité urbaine. Dans ce film las et hébété, qui essuie toute la merde de la société française, au propre comme au figuré, on traque le réenchantement. Il se niche d’abord dans les nappes de synthé féériques de Florent Marchet et prend corps lors de quelques scènes furtives et sublimes. » – Par Bruno Deruisseau.
Maigret de Patrice Leconte
« Leconte fait ce qu’il peut pour faire passer le total jemenfoutisme de Depardieu (qui est radicalement ailleurs, Dieu sait où, tout du long) pour de la mélancolie, et assure le remplissage en déversant des monceaux de quincaille rétro, poussant ses seconds rôles dans des pitreries vintage argotiques désolantes (“oh bah j’avais grandement faim, c’est rudement bon !”) pour tenter de compenser l’espèce d’épure crépusculaire que sa star lui impose. Le film gesticule pour se faire autour de lui, mais sans lui. Et sans nous. » Par Théo Ribeton.
{"type":"Banniere-Basse"}