Quand on achète un livre d’Agatha Christie, un seul coup d’œil sur la couverture peut vous mettre sur la piste du mystère qu’il recèle. Le premier plan d’un film de Nick Park vous donne exactement le même pouvoir. A Close shave, dernier opus des aventures de Wallace & Gromit, n’échappe pas à la règle. Dans […]
Quand on achète un livre d’Agatha Christie, un seul coup d’œil sur la couverture peut vous mettre sur la piste du mystère qu’il recèle. Le premier plan d’un film de Nick Park vous donne exactement le même pouvoir.
A Close shave, dernier opus des aventures de Wallace & Gromit, n’échappe pas à la règle. Dans une pièce sombre, l’ombre d’un mobile composé de moutons tourne lentement. Un tremblement fait s’agiter tous les bibelots et un couteau chute entre les deux chaussons de Wallace endormi. En train de tricoter, Gromit est intrigué par cette secousse tellurique. Un seul travelling, et l’intrigue est tissée. Une fêlure va s’immiscer dans le quotidien des deux compères et tout cela va se passer sous couvert d’histoires de moutons en suspens. La mise en scène de Nick Park se place immédiatement sous la houlette de trois grands bergers de l’histoire du cinéma : Hitchcock, Burton et Welles. Le montage et le suspense sont dignes des plus belles scènes hitchcockiennes, Wallace aurait été un excellent Cary Grant dans La Mort aux trousses. Le décor, la musique et le côté fantastique des événements appartiennent à l’univers de Tim Burton : quand les deux héros sont dans le champ de moutons, on pense au cimetière de Beetlejuice et à Batman quand Wallace se transforme en laveur de vitres. Enfin, la silhouette de Welles plane à travers les cadres et la profondeur de champ : lorsque Preston le bouledogue passe dans le champ avec une pendule pour seul décor derrière lui, on ne peut que penser à Welles, l’acteur cette fois, dans Le Troisième homme. Cette somme de références pourrait ternir ou écraser la mise en scène de Nick Park. Au contraire, celle-ci puise sa force dans l’histoire du cinéma. Le cinéma passe son temps à recréer la réalité pour mieux lui voler son essence. Wallace et Gromit sont des personnages de pâte à modeler évoluant dans un décor de carton-pâte. Leur univers, c’est l’essence même du cinéma : l’illusion du réel. Wallace et Gromit sont les derniers héros des temps modernes. Le cinéma croyait avoir décliné toutes les fins possibles et imaginables d’une histoire d’amour, mais une histoire d’amour râpé apparaît comme une nouvelle figure. Espérons que Nick Park va continuer à faire dérailler le train-train cinématographique.
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