Un p’tit noir. Version originelle des Nerfs à vif, cet honnête petit polar est la seule et relative réussite du médiocre Jack Lee Thompson. Cet été, certains films de plage ont de la bouteille, tel Les Nerfs à vif, solide thriller qui permettra de frissonner agréablement à l’abri de la canicule. Les Nerfs à vif […]
Un p’tit noir. Version originelle des Nerfs à vif, cet honnête petit polar est la seule et relative réussite du médiocre Jack Lee Thompson.
Cet été, certains films de plage ont de la bouteille, tel Les Nerfs à vif, solide thriller qui permettra de frissonner agréablement à l’abri de la canicule. Les Nerfs à vif est la seule (et relative) réussite de Jack Lee Thompson, cinéaste anglais exilé à Hollywood où, à partir du succès des Canons de Navarone, il enchaînera une profusion de navets, véhicules peu reluisants pour Anthony Quinn ou un Charles Bronson canonisé. Anticipant ces polars douteux, Les Nerfs à vif est déjà un film noir sécuritaire qui baigne dans une phobie inquiétante de l’Autre. En l’occurrence Robert Mitchum, un ancien détenu désirant se venger du témoin qui, huit ans auparavant, l’a envoyé en prison pour une affaire de viol. Mitchum interprète avec gourmandise ce personnage de corrupteur, incarnation paillarde et brutale du Mal, souvent filmé torse nu, au cas où on n’aurait pas remarqué sa bestialité. De toute façon, tout le monde est antipathique dans Les Nerfs à vif. Mitchum, en diablotin goguenard, n’est vraiment pas sortable. Quant à Gregory Peck, raide comme un piquet, il est impossible d’éprouver la moindre compassion pour son personnage d’avocat chiant comme la pluie qui craint pour sa famille maintenant que le fauve est lâché. Le film, parabole sur la contamination du Mal, décrit déjà un monde pourri par les entorses et les arrangements (avocat véreux, flic conciliant…). Lorsque Peck décide de passer du côté de la légitime violence en face de la léthargie de la loi, il est bien peu convaincant, tant comme personnage que comme interprète. Au moment de l’ébauche de transfert entre les deux ennemis dans un duel nocturne et aquatique, Peck sort soudain de sa torpeur pour sombrer immédiatement dans la grandiloquence. Que reste-t-il des Nerfs à vif, hormis la composition amusante de Mitchum ? La musique de Bernard Herrmann, qui crée un climat d’angoisse nettement plus moderne que les mouvements de caméra maladroits de Lee Thompson. Et surtout, comble du paradoxe, un remake réalisé par Scorsese en 1991 qui développe la perversité de l’histoire en décuplant les scènes de violence par une virtuosité exhibitionniste. Ainsi, la menace sexuelle que représente Mitchum pour la fille se résume-t-elle à une simple approche frontale dans la version de 62, tandis que Scorsese instaure une relation bien plus érotique. Si on peut trouver le remake tardif de Scorsese nettement plus abouti que son modèle, on ne boudera pas ce bon petit film noir, qui distille avec une régularité un peu trop mécanique fausses frayeurs et scènes chocs, sans hélas oser aller aussi loin que son sujet le laissait espérer.
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