Les Smad, ou services de médias audiovisuels à la demande, modifient la commercialisation traditionnelle des films. A Dijon, les participants aux Rencontres cinématographiques ont interpellé les pouvoirs publics.
Chaque année, à l’automne, les professionnels de la profession font étape à Dijon aux Rencontres cinématographiques organisées par l’ARP (association d’auteurs, réalisateurs et producteurs).
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C’est l’occasion de voir les copains entre deux tournages, de boire du bourgogne avec le maire, François Rebsamen, mais aussi et surtout de parler ouvertement des sujets qui fâchent.
Cette année, fin octobre, les participants n’avaient qu’un seul « mot » à la bouche : Smad. Les services de médias audiovisuels à la demande, voilà le nouveau défi qui secoue le cinéma français.
De nouveaux services pour une nouvelle façon de voir des films
Un simple coup d’oeil à la composition des personnalités invitées à s’exprimer sur la scène du Grand Théâtre de Dijon suffisait à mesurer l’étendue des « dégâts » : Martin Rogard, DG France de Dailymotion ; Jérémie Manigne, DG « Innovation » chez SFR ; André Bousquet, vice-président de Samsung France ; Christophe Muller, directeur des partenariats de YouTube…
C’est peu dire que face à ces jeunes loups, Bertrand Tavernier, qui présidait ces Rencontres, faisait figure de grand-père amateur de bons vieux films de cape et d’épée.
Au centre des discussions, l’émergence de nouveaux services (vidéo à la demande (VOD), « télévisions connectées », bientôt Google TV…) qui proposent des films à la location et bouleversent la chronologie traditionnelle en trois temps : sortie en salles, DVD, diffusion télé.
Pour les films fragiles, éjectés des salles après la fameuse première semaine d’exploitation, ces Smad sont peut-être la promesse d’une nouvelle carrière.
Aux Etats-Unis, le sublime Two Lovers de James Gray, injustement sorti dans une simple poignée de salles à New York et à Los Angeles en 2008, a multiplié par deux ses recettes grâce aux revenus tirés de l’exploitation VOD simultanée.
Des innovations qui effraient encore
Mais pour une profession héritière d’un art séculaire, méfiante quant aux motivations plus pécuniaires qu’artistiques des nouveaux entrants, les Smad pourraient faire s’effondrer l’équilibre mis en place pour la production des oeuvres.
Pivot de ce système, Canal+, qui pré-achète de nombreux films en échange d’une fenêtre d’exclusivité, a d’ailleurs, par la voix de son directeur, Rodolphe Belmer, lourdement mis en garde contre une remise en cause « inutile et dangereuse » de la sacro-sainte chronologie des médias. Carton à l’applaudimètre.
Dans son communiqué final publié à l’issue des Rencontres, l’ARP s’est montrée plus pragmatique. Prenant acte de leur inéluctable croissance, elle demande au ministère de la Culture que les Smad contribuent en retour au financement des oeuvres.
C’est tout le sens du décret dit « Smad », que Frédéric Mitterrand devait transmettre au Conseil d’Etat. Mais le texte s’annonce peu contraignant, depuis que le CSA a surpris son monde en retoquant la première mouture. Trop d’obligations empêcheront le développement souhaitable des Smad, juge le Conseil. Le débat amorcé à Dijon ne fait à l’évidence que commencer.
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