LES CONTREBANDIERS DE MOONFLEETde Fritz Lang, avec Stewart Granger, Liliane Montevecchi, Joan Greenwood (1955, Etats-Unis, 85 mn) Chef-d’œuvre de la période hollywoodienne de Lang, Moonfleet est un film de chevet qu’on a envie d’offrir aux autres, un film de passeur sur le passage. Pour la cinéphilie française, « Moonfleet » sonne comme un mot de passe. Pourtant, […]
LES CONTREBANDIERS DE MOONFLEET
de Fritz Lang, avec Stewart Granger, Liliane Montevecchi, Joan Greenwood (1955, Etats-Unis, 85 mn)
Chef-d’œuvre de la période hollywoodienne de Lang, Moonfleet est un film de chevet qu’on a envie d’offrir aux autres, un film de passeur sur le passage.
Pour la cinéphilie française, « Moonfleet » sonne comme un mot de passe. Pourtant, Fritz Lang lui-même a souvent parlé de ce film, dernier avatar des aventures historiques tournées avec Stewart Granger, comme d’une simple commande.
Granger y interprète Jeremy Fox, un contrebandier qui recueille malgré lui John Mohune, un jeune orphelin, bientôt mêlé aux affaires louches de ce père de substitution, mauvais et malhonnête mais admiré.
Le film est en Cinémascope, format inhabituel dans l’œuvre de Lang qui prétendait le détester,
tout juste bon, comme il l’affirme dans Le Mépris,
à filmer les serpents et les enterrements. Le cinéaste dénigra aussi le dénouement, happy end imposé par les studios qui vient s’ajouter à la conclusion voulue par Lang, plus pessimiste. Il n’empêche que pour plusieurs générations de cinéphiles, Moonfleet est le film d’un esthète et d’un moraliste,et l’un des sommets de sa carrière.
Cette histoire de faux fantômes cachés dans
un cimetière sur une lande reconstituée en studio n’est pas sans rappeler le romantisme noir d’un
de ses grands films muets allemands, Les Trois Lumières. L’écran large honni par Lang
ne l’empêche pas de composer des plans rigoureux et élégants à la picturalité discrète. Quant au récit d’apprentissage dans lequel un garçon est confronté à la violence et la mort, il confirme le regard implacable de Lang sur l’humanité. Le cinéaste a transformé cette série B en chef-d’œuvre sur la fin de l’enfance et l’entrée dans le monde des adultes.