A quand remontent tes premiers souvenirs de cinéma ? Le premier film que j’ai vu, c’était La Cuisine au beurre. Ça devait être en 1965, et il me semble que c’était ma première sortie au cinéma avec mes parents. Ils allaient voir systématiquement les films avec Bourvil, et cette fois-là, j’étais du voyage. La salle […]
A quand remontent tes premiers souvenirs de cinéma ?
Le premier film que j’ai vu, c’était La Cuisine au beurre. Ça devait être en 1965, et il me semble que c’était ma première sortie au cinéma avec mes parents. Ils allaient voir systématiquement les films avec Bourvil, et cette fois-là, j’étais du voyage. La salle s’appelait Le Viking, à Flers. J’avais 6 ans… J’avais adoré le film : La Cuisine au beurre, c’était pour moi le summum de l’humour, on ne pouvait pas imaginer mieux. Depuis, j’ai changé d’avis : Anne-Marie Carrière en gretchen, on a quand même fait nettement plus fort… J’ai du mal à dire si j’étais plus sensible à l’humour que les autres gamins de mon âge, en tout cas, le jour où ma grand-mère m’a demandé ce que je voulais faire comme métier plus tard, j’ai répondu « Roger Pierre et Jean-Marc Thibaud ». Je ne sais plus à quel âge exactement j’ai formulé ce voeu absolu, mais j’ai souvenir que la table était plus haute que moi… Plus tard, à la fin des années 60, j’ai pris l’habitude d’aller voir tous les films avec Louis de Funès. J’allais aussi voir les dessins animés et les films de Tintin, même si je préférais les Astérix de l’époque. J’étais lecteur de Pilote et, déjà, je trouvais que Tintin était de droite.
Quels sont les films qui te sont les plus chers ?
J’aime beaucoup revoir La Vie est belle de Frank Capra, avec James Stewart et Donna Reed. Pour la poésie du propos, la légèreté, la façon dont c’est filmé. L’image de l’ange qui veut gagner ses ailes, je trouve que c’est magnifique. Et puis la chute dans la piscine, la petite chanson, et le moment où l’héroïne se retrouve toute nue dans le bosquet : tout ça me touche énormément. Sans oublier la question centrale du film : que serait le monde qui nous entoure si on n’avait pas existé ? Je n’ai pas du tout la nostalgie de cette époque du cinéma, mais cette grâce-là est quand même assez exceptionnelle… En France, j’ai toujours été attiré vers les films de François Truffaut avec une passion particulière pour L’Argent de poche et ceux de Claude Chabrol : Que la bête meure, avec Michel Duchaussoy et Jean Yanne, c’est tellement fort qu’on dirait du Hitchcock. J’aimerais tellement tourner avec Chabrol… Récemment, j’ai adoré Festen de Thomas Vinterberg. J’aurais pu être gêné par le parti pris technique mais, finalement, le procédé fonctionne très bien pour cette histoire de famille. Le scénario et le sujet sont tellement forts qu’on oublie très vite la caméra. Plus récemment encore, j’ai bien aimé le film de Catherine Corsini, La Nouvelle Eve.
Parle-nous de tes goûts en musique.
Je ne suis pas très rock’n’roll. L’ambiance, chez moi, c’est plutôt chanson française : Jean Constantin qui a une légèreté « pas culturelle » et puis les évidents, Trenet, Brassens, Brel. Je suis très attaché aux mots : j’aime comprendre ce que dit une chanson. Ça me vient sans doute de l’enfance, parce que chez nous mon père nous passait en boucle ses chansons favorites du moment : il y a eu la période Je suis venu te dire que je m’en vais de Gainsbourg, puis la période Les Coeurs purs de Jean-Roger Caussimon, ou encore Avec le temps de Léo Ferré. Plutôt des bons choix, qu’on écoutait religieusement, concentrés sur les mots… Du côté des découvertes, je me suis beaucoup attaché aux chansons de Katerine pendant le tournage du film de Jugnot, j’écoutais ça dès que j’avais un moment de libre. J’aime ses mélodies, son ambiguïté… Il y a un autre type que j’aime beaucoup, c’est Thomas Fersen. Vous devriez en parler plus de ce gars-là. « Qu’est-ce qu’on est bête quand on est amoureux », c’est quand même joli de chanter ça. Il y a aussi une chanson remarquable sur un album de la chanteuse Juliette, L’Etoile rouge : un truc frontalement de gauche, assez nostalgique, que je me souviens avoir écouté en boucle dans un train entre Bordeaux et Paris.
Tes auteurs préférés ?
Marcel Aymé, en particulier parce que ses textes sont beaux à dire, et puis aussi Sacha Guitry. Comme par ailleurs on ne rit pas souvent en lisant des livres, je tiens à citer Raymond Queneau et Les oeuvres complètes de Sally Mara, un magnifique livre, intelligent, cultivé et débordant d’humour. Enfin, deux découvertes récentes : les bouquins d’Eric Holder et un livre de Jean-Louis Fournier le type qui réalisait les émissions de Pierre Desproges , Il a jamais tué personne, mon papa, un texte à la fois bouleversant et drôle.
Emmanuel Tellier
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