L’odyssée SF de Bruno Dumont, le Hong Sang-soo trimestriel et le nouveau film de Xavier Legrand… Voici les films à voir (ou pas) cette semaine !
L’Empire de Bruno Dumont
Si l’on pourrait voir dans ce combat intersidéral une banale opposition du Bien et du Mal, le monde filmé par Dumont n’est jamais binaire. Chez lui, le Bien et le Mal n’existent pas en soi. L’Empire fait d’ailleurs répéter à ses personnages la vacuité de ces termes. C’est pourtant la collision de ces deux forces qui va libérer une énergie immense lors de l’affrontement final, splendide ballet que le cinéaste conduit avec une puissance épique bouleversante.
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Walk Up de Hong Sang-soo
Tout en y déployant les qualités habituelles de son cinéma, notamment cette façon de faire jaillir le sublime, l’intense et le profond au milieu du banal, du bénin et du trivial, Hong Sang-soo signe un film particulièrement habité, dont le sujet est même, au fond, l’habitation de soi.
La critique de Bruno Deruisseau
Le Successeur de Xavier Legrand
On se demande si l’intrigue va aller à son terme sans jamais excéder ce bouillon tout juste frémissant où flotte, il faut le dire, une sacrée collection de platitudes, quand soudain le film sort de ses gonds de la manière la plus inattendue qui soit, virant plus ou moins au drame horrifique. Difficile d’en dire plus sans déflorer l’intrigue : disons que Le Successeur, à partir de là, devient non pas un autre film, mais deux, si dissemblables qu’ils peinent totalement à communiquer l’un avec l’autre.
Sleep de Jason Yu
Le jour, Sleep est une dramédie romantique sur une classe moyenne coréenne au très faible taux de natalité ; la nuit, il est un survival effréné faisant des crises de somnambulisme le réceptacle métaphorique de l’anxiété des jeunes parents – sécurisation totale de l’appartement, mise hors d’atteinte des objets coupants, extinction des écrans avant le sommeil…
Bye Bye Tibériade de Lina Soualem
Lina Soualem rassemble les pièces à conviction, ressort les photos, les petits films, les poèmes écrits très jeune par sa mère. De cet amoncellement de matière, la cinéaste tire un documentaire ramifié qui fixe la puissance d’un lien et dessine avec un sens du détail et de la nuance la généalogie de ces femmes, de ces générations prises entre tradition et modernité, une compatibilité que le cliché interdit et que Bye Bye Tibériade vient habilement éroder.
La critique de Marilou Duponchel
Universal Theory de Timm Kröger
“Dans quel monde vivons-nous”, s’interroge l’un des personnages d’Universal Theory, dont l’attrait se loge dans la tentative de ce scientifique de rationaliser une réalité qui se délite. Pour s’accorder à l’état troublé de Johannes, Timm Kröger combine différents éléments formels du film noir rappelant l’expressionnisme allemand. Pourtant, le long métrage ne tombe pas dans le pastiche mais se veut plutôt une invocation de fantômes, ceux de Johannes, de l’Histoire, du cinéma.
Le Royaume des abysses de Tian Xiaopeng
Le film donne la très vive impression d’observer un diorama violemment secoué dont les pièces se détachent et s’entrechoquent. C’est un ballet psyché, dense et chargé, qui semble parfois tout droit sorti d’une IA sous ecstasy et qui provoque un certain malaise. Vient alors la grande conclusion qui fait réévaluer tout le film et cette débauche.
Il fait nuit en Amérique d’Ana Vaz
Dans l’obscurité factice de la nuit, Ana Vaz invente une fable alternative, à la fois atmosphérique et fantastique (grâce notamment à la superbe musique originale de Guilherme Vaz), qui recompose le monde moderne en se détachant du point de vue anthropocentrique habituel.
Le Pion du général de Makbul Mubarak
Makbul Mubarak, dont Le Pion du général est le premier long métrage prometteur, sait parfaitement créer un climat angoissant, asphyxiant, notamment en réduisant la taille de l’image à l’aide de miroirs, de premiers plans flous qui dissimulent partiellement les arrière-plans nets, comme si tout était regardé à travers un judas. La lumière glauque créée par son chef opérateur enveloppe tout d’un vert malaisant.
La critique de Jean-Baptiste Morain
Double foyer de Claire Vassé
Le côté “sujet de société” n’est pas l’aspect le plus intéressant, loin de là, du premier film en tant que réalisatrice de Claire Vassé, ex-critique de cinéma (notamment à Positif), ex-productrice à France Culture et romancière : au fond, on s’en fiche un peu qu’un couple préfère vivre séparément. Le plus intéressant, c’est la mise en scène, les couleurs vives de la photo, une sorte de joie triste des dialogues et des situations, la beauté de Toulouse, sa lumière, loin de tout aspect folklorique.
La critique de Jean-Baptiste Morain
Les Derniers Hommes de David Oelhoffen
Les Derniers Hommes de David Oelhoffen (Nos Retrouvailles, Loin des hommes, Frères ennemis) est un film sur le choix et le hasard, sur le fait de prendre telle ou telle route, telle ou telle décision, sans savoir jamais quelle est la bonne. Mais ce choix concerne aussi le passé de ces soldats depuis leur engagement dans la Légion étrangère, corps d’élite de l’armée française, une France qui les a aussi laissés tomber au fin fond de son empire
La critique de Jean-Baptiste Morain
Une histoire vraie de David Lynch
À travers ce périple élégiaque, David Lynch nous raconte simplement un amour fraternel qui ne se formule pas autrement que par un échange de regards. Toute la beauté d’Une histoire vraie réside dans la simplicité de son geste, celui d’un vieil homme qui prend la route pour retrouver son frère.
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