Le Voyage d’Arlo

Pixar étant naturellement associé à des high concepts travaillant loin des schémas de l’industrie (au premier rang desquels Vice-versa), disons franchement que Le Voyage d’Arlo n’a depuis l’annonce de sa sortie suscité qu’une curiosité polie, voire une certaine méfiance : histoire d’amitié homme-animal déjà vue mille fois, design peu ragoûtant façon L’Age de glace, et surtout une sorte de dimension initiatique qui étrangement s’annonçait mal, comme une grosse tartine d’obstacles, d’épreuves et de choix pilotant lourdement le développement intime du personnage.

            {"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
          

Toutes ces réserves s’avèrent presque fondées, et pourtant Le Voyage d’Arlo s’en tire bien. Rien n’y est neuf, mais tout y est vivant. Etonnant comme le film ne se situe jamais dans la mythologie Pixar, ne joue pas sur la pénombre, les mondes dans le monde, tout à son travail bien plus modeste sur ce vieux thème du passage à l’âge adulte sous le poids impérieux des figures paternelles (on pense beaucoup au Roi lion).

Hésitation entre la prédation et la sociabilité

Une problématique également dont on n’avait pas soupçonné l’irruption : l’aspect uchronie (l’astéroïde ayant manqué sa cible, les dinosaures sont devenus l’espèce terrestre la plus intelligente) qui s’intéresse au point de bascule où la cohabitation des êtres dépasse leur entre-dévoration et devient de la culture – entre les deux personnages principaux, le diplodocus parlant et son petit compagnon humain (sorte de chien errant), mais aussi du côté des dinosaures, doués de parole, entre lesquels se joue toujours une ambiguïté, une hésitation entre la prédation et la sociabilité qui titille habilement notre perception des personnages.

Anecdotique, le film l’est certainement si l’on repense à l’architecture mentale étourdissante de Vice-versa, mais il y demeure une volonté de surprendre, d’inventer, de sortir de soi-même, qui mérite mieux que l’indifférence.

Le Voyage d’Arlo de Peter Sohn (E.-U., 2015, 1 h 35)