Un reboot indigeste de la Bible où Jaco Van Dormael étouffe ses acteurs dans des sacs de nœuds narratifs tout en glorifiant les doux benêts.
Evangile et manuel de coaching personnel
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“Dieu existe, il habite à Bruxelles” : c’est la punchline du Tout Nouveau Testament, qui propose un reboot de la Bible, à l’époque contemporaine et en Belgique, où la fille de Dieu (une gamine de 10 ans dont l’existence était restée cachée) descend sur Terre imiter son grand frère.
Elle recrute une bande d’âmes esseulées (une femme trompée, un SDF, un enfant malade…) qu’elle promeut apôtres pour refaire le monde à sa façon, et écrire avec eux un Evangile moderne en forme de manuel de coaching personnel.
Gare au gorille
On le connaît d’avance : c’est le côté par nature indigeste de ces blockbusters séniles déployant l’artillerie du cinéma de studio dans des sacs de nœuds narratifs dont ils croient pouvoir dégager quelques maximes neuneus sur le sens de l’existence.
Jaco Van Dormael est un professionnel du genre (Toto le héros et Mr. Nobody rivalisaient déjà de pompiérisme et de métaphysique de comptoir), mais l’accident industriel prend, cette fois-ci, des proportions tchernobylesques, avec un mauvais goût qui ne semble plus tolérer de limites.
Tous les acteurs passent sous son bulldozer, à commencer par Catherine Deneuve, qui joue une des apôtres et que le film propulse le plus sérieusement du monde dans une romance zoophile : il faudra du temps pour effacer de nos souvenirs le plan qui la voit se réveiller au lit avec un gorille.
Glorifions la bêtise
Au terme de cette sidérante tartine de vivre-ensemble mystique à la sauce TF1, Yolande Moreau, qui avait jusque-là roulé des yeux et gloussé de peur, dans son indéboulonnable rôle de mémère, prend les rênes du monde. C’est le personnage le plus bête du film.
La bêtise (on ne trouve pas de meilleur mot), c’est aussi ce que partagent les six apôtres : Van Dormael aime plus que tout les filmer nigauds, interloqués, les faire balbutier.
Il aime les doux benêts, les âmes simples, ce qui est bien louable et ne serait qu’un caractère un peu niais s’il ne poussait pas ce goût jusqu’à un rapport embarrassant à la déficience, qui prend dans ses films des airs d’élévation spirituelle (Le Huitième Jour, c’était lui).
C’est ce qui rend ce Testament terrifiant : Van Dormael semble ne rien trouver de plus rassurant que la dégénérescence mentale. Rassurant, oui, parce que le film ne s’attaque qu’à des inquiétudes, des anxiétés banales, les tracas du boulot et de la vie de couple, la peur de mourir ; encore une fois, le niveau de ses interrogations existentielles est celui de tout bon manuel de coaching personnel.
Et sa réponse-réflexe, c’est d’alléger la vie de tous ses poids, de la simplifier, de l’aplanir – bref, son horizon, son salut, c’est la lobotomie.
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