Les ennuis du cinéaste géorgien Sergueï Paradjanov avec les autorités soviétiques. Un film empathique et drôle autour d’un homme bigger than life.
Cette semaine ressort en salle l’un des chefs-d’œuvre du cinéaste géorgien d’origine arménienne, Sergueï Paradjanov (1924-1990), Les Chevaux de feu (1965), le film qui fit connaître du public occidental ce cinéaste baroque et inspiré. Le Scandale Paradjanov évoque comme dans un rêve et souvent comme dans un cauchemar l’existence chaotique de ce cinéaste extravagant, plus grand que la vie, sorti de la prestigieuse VGIK (école de cinéma de Moscou), dans une URSS évidemment peu amène avec son anticonformisme et sa liberté de création.
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Le film raconte notamment comment Sayat-Nova (1968), son autre chef-d’œuvre, braqua le pouvoir contre lui. Pourquoi il passa quatre ans dans les geôles soviétiques d’Ukraine, où il se consacra à l’art du collage pendant qu’en Europe de l’Ouest des personnalités comme Saint Laurent, Sagan ou Aragon tentaient de le faire libérer. Les autorités n’avaient pas apprécié que le film soit tourné en dialecte houtsoul (pratiqué dans les Carpates ukrainiennes) et non en russe. Suspecté de nationalisme, il fut condamné en 1974 pour “commerce illicite d’objets d’art, homosexualité et agression sur la personne d’un fils de dignitaire du régime”… Après sa libération, il refera quelques séjours en prison jusqu’en 1982, et tournera heureusement quelques films. Toujours émerveillé, il pourra aussi sortir d’URSS et voir Paris avec ses yeux d’enfant.
Cette évocation de Paradjanov, parfois un peu maladroite dans ses petites afféteries de cinéma, brille surtout par le regard bienveillant et la chaleur humaine qui s’en dégagent. Son merveilleux interprète principal (et coréalisateur), Serge Avédikian, incarne son modèle avec des délices et une malice communicatives. Tantôt larmoyant, presque geignard, tantôt mégalomane, mais toujours avec humour, Paradjanov n’est jamais ridicule. Il est trop. Et cela suffit à faire notre bonheur et à avoir envie de voir et revoir ses films.
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