Le Radeau de la MéduseSortie Le Radeau de la Méduse est une œuvre belle et paradoxale, totalement atypique dans le cinéma français, un film à grand spectacle antispectaculaire. En 1816, la frégate royale La Méduse fait voile vers le Sénégal mais s’échoue dans des bancs de sable au large des côtes africaines. Le commandant et […]
Le Radeau de la Méduse
Sortie Le Radeau de la Méduse est une œuvre belle et paradoxale, totalement atypique dans le cinéma français, un film à grand spectacle antispectaculaire. En 1816, la frégate royale La Méduse fait voile vers le Sénégal mais s’échoue dans des bancs de sable au large des côtes africaines. Le commandant et les passagers se sauvent dans des canots, laissant derrière eux une centaine de marins et soldats sans vivres qui s’entassent dans un radeau construit à la hâte. Au bout d’une exténuante dérive, quatorze rescapés révéleront la vérité, provoquant d’importants troubles politiques. Cet épisode historique a inspiré le célèbre tableau de Géricault qui lui-même a servi de point de départ au film d’Azimi. Film qu’il faut absolument distinguer des habituelles reconstitutions historiques au label Qualité française, film qui renvoie dans les placards amidonnés qu’ils n’auraient jamais dû quitter tous les Beaumarchais ou Hussard sur le toit du monde.
Comme Le Radeau de la Méduse est quand même un film historique, il comporte certes les perruques, les costumes et les décors d’usage dans le genre ; mais Azimi, grand admirateur de Murnau, Bresson ou Rossellini, sait que le cinéma est l’art du présent et du vivant, il ne méconnaît pas son essence documentaire. Alors, il filme au plus près des corps tordus et des visages souffrants, dans la lignée picturale du tableau de Géricault, mais aussi pour incarner au maximum son sujet, pour briser la gangue d’Epinal. Il se garde également d’en rajouter dans les détails du décor, dans la maniaquerie imitative, préférant se concentrer sur la pâte humaine de son matériel, sur ses sentiments, ses passions et ses drames qui, eux, sont de toutes les époques.
Le risque d’un naturalisme poussiéreux et mensonger est aussi éloigné par une théâtralité assumée, superbement portée par un remarquable casting. Le Radeau… porte en lui une tension permanente entre le lyrisme romanesque de son sujet et la sécheresse altière de sa mise en scène, entre la majesté de ses décors ou de sa musique et l’épure rigoureuse de ses cadrages et mouvements d’appareil. De cette dialectique naît l’étrange beauté du film, comme un croisement impossible entre Curtiz et Rivette, Chéreau et Bresson, Titanic et Lifeboat, Géricault et Hergé.
A propos de ce film aux moyens financiers… moyens et qu’il a mis des années à achever, Azimi parle de « superproduction artisanale ». On ne saurait mieux résumer l’histoire de la production de ce Radeau…, l’irréductibilité magnifique de son pari éthique et artistique.
Sorti depuis le 22 juillet.
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