Un documentaire fascinant qui plonge dans l’œuvre de Giacinto Scelsi, compositeur italien qui disait recevoir sa musique de divinités hindoues.
La trace laissée par un souvenir d’enfance est la porte d’entrée de ce documentaire de Sebastiano D’Ayala Valva. Enfant, ce réalisateur italien était terrifié lorsque son père lui faisait écouter la musique d’un cousin éloigné : Giacinto Scelsi. S’il convoque le sillon creusé en lui-même par l’œuvre mystique de Scelsi, D’Ayala Valva mène aussi l’enquête auprès de son père, profondément marqué par cette musique, et d’interprètes qui ont côtoyé Scelsi de son vivant. Entre ces témoignages, on entend la musique mais également la voix de Scelsi. Car ce compositeur doublé d’un poète a enregistré une autobiographie sur bandes sonores quatre nuits durant, avec l’exigence qu’elles ne soient rendues publiques que quinze ans après sa mort, intervenue en 1988.
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Entourée de mystère, l’œuvre de Giacinto Scelsi s’en charge d’autant plus lorsqu’on tente d’y pénétrer. De retour d’un voyage en Inde et après un séjour en hôpital psychiatrique où il aurait sans cesse joué la même note pour en explorer toutes les variations, il développe une nouvelle manière de composer. Reclus dans son appartement romain, un ondioline (ancêtre du synthétiseur) au bout des doigts, il improvise sa musique dans un état de transe, l’enregistre puis demande à des collaborateurs de la retranscrire . Il en découle une œuvre venue d’outre-tombe, qui donne l’image d’une sorte de Steve Reich plus transcendantale, quasi tribale et foncièrement dark. Aurait -il vécu à notre époque qu’il se serait peut-être laissé tenter par une techno industrielle mâtinée d’ambient expérimentale.
Si le film est réussi, tant comme voyage dans un pays sonore énigmatique que comme portrait d’un homme à travers la trace qu’il a laissée sur les êtres et les ondes, on regrette toutefois qu’il ne fasse pas assez confiance dans sa capacité à retranscrire visuellement la singularité de l’œuvre de Scelsi.
Le premier mouvement de l’immobile, de Sebastiano D’Ayala Valva (It., Fr., 2019, 1h21)
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