Une kitscherie socialiste où le talent du futur ciné-poète géorgien affleure pourtant par bribes.Sergueï Paradjanov, génial poète lyrique des Chevaux de feu, folkloriste baroque de Sayat Nova, signe là son deuxième film. De prime abord, nous nageons dans le réalisme socialiste de la plus belle eau les joies des récoltes de blé dans les […]
Une kitscherie socialiste où le talent du futur ciné-poète géorgien affleure pourtant par bribes.
Sergueï Paradjanov, génial poète lyrique des Chevaux de feu, folkloriste baroque de Sayat Nova, signe là son deuxième film. De prime abord, nous nageons dans le réalisme socialiste de la plus belle eau les joies des récoltes de blé dans les kolkhozes et les amourettes des paysannes aux nattes blondes , mais on peut trouver quelques points communs entre cette œuvre de commande et les réalisations subséquentes du cinéaste. Paradjanov ne se prive pas pour glisser par-ci, par-là quelques plans, quelques scènes où affleure la profondeur archaïque du vrai folklore et de l’histoire (russe ou géorgienne), auxquels il consacrera le reste de son œuvre. Il démontre de la passion pour la nature et fait preuve d’un indéniable sens plastique dans sa mise en scène ; par exemple dans une séquence simple où la jeune héroïne court la nuit, vêtue d’une robe claire. Quant aux costumes bariolés et fleuris, ils annoncent les films « ethniques » du cinéaste. Certes, ce Paradjanov-là, c’est un peu un Glauber Rocha qui aurait fait ses classes en tournant des comédies musicales à la Minnelli. Certes, c’est remarquablement filmé mais d’autres cinéastes russes importants ont débuté avec des œuvres franchement plus convaincantes (Tarkovski avec L’Enfance d’Ivan, Kontchalovski avec Le Premier Maître, sans parler d’Eisenstein). Certes, c’est une niaiserie sur le bonheur des stakhanovistes ruraux et un œil non averti n’y reconnaîtrait jamais l’auteur des Chevaux de feu hantés. Mais il y a quelque chose de profond et d’authentique dans ce déluge de kitsch en Sovcolor.
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