Adapté du célèbre livre de Gaston Leroux, un film-BD tintinesque bourré de charme et de fantaisie.
Attention, la boule noire est lâchée ! Mais ne pas attendre qu’elle déboule en avalanche pour servir un mystère dont la saveur réside dans l’attente et la montée du désir. Comme cette boule qui ouvre le film, suivant les soubresauts mécaniques d’une machine bricolée pour provoquer des réactions en chaîne, Rouletabille se lance dans l’enquête du « mystère de la chambre jaune ». Un train électrique prend le relais de ce parcours aussi ludique qu’énigmatique, pour conduire notre fringant et « tintinesque » reporter à Moulinsa… euh non, au château du Glandier, où vivent le professeur Stangerson et sa fille, et où l’attendent couloirs obscurs, obstacles infranchissables et soudain débouchés.
L’ambiance vieillotte et la présence de gadgets pourraient faire craindre que le poulain reniflant les coins et recoins de cette noble demeure campagnarde ne s’appelle Amélie. Mais on est vite rassuré ; ici, pas de succession de plans « boîte à idées » publicitaires tels que les chérit Jeunet. En adaptant le célèbre roman de Gaston Leroux, Bruno Podalydès s’est entièrement mis au service du mystère. Choisissant de prendre son temps, tel Rouletabille qui pousse le vice jusqu’à reporter de quelques heures le dévoilement de la vérité, le réalisateur évite de tomber dans le piège d’une poésie trop fabriquée ou d’un film policier grand public qui nous ferait perdre, par son souci d’efficacité, la compréhension de l’enquête et le charme des parfums qui se diffusent dans le noir.
Le rythme choisi, calqué sur le chapitrage du livre, rappelle autant la forme sérielle de la littérature populaire que le cinéma muet ou même le type de découpage propre à la bande dessinée. Traversé par ces différentes influences artistiques, Le Mystère… devient aussi bien une nouvelle aventure de Tintin ou de Mandrake le Magicien qu’un énième épisode de Fantomas.
Bref, un bel hommage aux premières heures du cinéma et de la BD comme aux premiers temps de l’existence. Car on ne peut ignorer que se joue ici une part importante de l’enfance, autant à travers ce que révèle l’histoire que sur ce qui se joue pour le réalisateur même : jonglant avec ce qui a pu nourrir son imaginaire, il dessine un lien fort entre cette chambre jaune et une autre chambre, noire, elle. La chambre devient alors le support de fantasmes qui se rejoignent : celui de la vérité cachée et celui, artistique, qui donne naissance aux images de cette fiction.
Fidèle au roman de Leroux, Podalydès ne peine pas pour autant à investir personnellement la chambre jaune. Insufflant par petites touches son humour dans les rouages de cette mécanique déjà fantaisiste, il sait créer de désopilants décalages, surtout quand il s’agit de faire le caméléon. Servi par des acteurs tous aussi parfaits les uns que les autres, à commencer par le frérot Denis, Bruno Podalydès, tel Rouletabille, semble indéniablement avoir une fois de plus suivi « le bon bout de sa raison ».
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