Le titre du dernier film de Steven Spielberg a un petit air de déjà-vu. Le Monde perdu, c’est d’abord un roman d’Arthur Conan Doyle adapté au moins deux fois par Hollywood, en 1925 par Harry Hoyt et en 1960 par Irwin Allen. Cette version n’est finalement que la remise au goût du jour d’un récit […]
Le titre du dernier film de Steven Spielberg a un petit air de déjà-vu. Le Monde perdu, c’est d’abord un roman d’Arthur Conan Doyle adapté au moins deux fois par Hollywood, en 1925 par Harry Hoyt et en 1960 par Irwin Allen. Cette version n’est finalement que la remise au goût du jour d’un récit déjà figé par la littérature populaire et le cinéma d’aventure classique. Surenchère technologique en quête d’un surcroît de réalisme, distanciation ironique dans la description des personnages et l’enchaînement des péripéties, Le Monde perdu confirme une fois de plus Spielberg dans sa posture de maître du recyclage high-tech. Conçu pour profiter du succès de Jurassic Park, le film plonge une poignée de personnages dans un récit minimal essentiellement fondé sur la juxtaposition assez ennuyeuse de morceaux de bravoure sans réel souci de liaison. Deux groupes humains, de doux scientifiques et de féroces chasseurs, font irruption sur une île abritant des animaux préhistoriques maintenus en liberté dans un environnement naturel.
En élève doué qui a vu tous les films, Spielberg cite consciencieusement quelques grands ancêtres. Mais le cinéaste n’a pas oublié les leçons de frayeur d’Alfred Hitchcock à qui il pique quelques idées utilisées dans Les Oiseaux. L’ouverture d’Hatari d’Howard Hawks est littéralement pompée et les grands monstres japonais de la Toho sont remémorés. Une séquence particulièrement spectaculaire (une camionnette est suspendue à la verticale dans le vide, l’héroïne est couchée sur le pare-brise qui s’étoile et se fissure progressivement) rappelle que le grand souci de Spielberg a toujours été de vouloir reproduire les conventions des serials des années 30 et 40 et leurs effets de suspense. Mais cette scène, plastiquement ébouriffante, confirme aussi la capacité du cinéaste à inventer, dans ses meilleurs moments, d’authentiques cauchemars régressifs.
A quelques moments près, Le Monde perdu ne mériterait guère que l’on s’y arrête. Pourtant, lorsque le film se conclura par un appel écologique à laisser vivre les bestioles loin de l’homme et à ne pas perturber leur existence, il effleure un fantasme d’aseptisation un peu débectant. La Terre débarrassée de l’humanité et de son principe du mal est un rêve affligeant.
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