Porté par un casting impressionnant, le nouveau film de Dominique Cabrera recèle de vrais moments de grâce. Avec ce film, Dominique Cabrera fait écho à son très beau autodocumentaire Demain, encore demain. Ici, il s’agit d’une femme, Christelle, qui va brutalement quitter son domicile pour se mettre hors jeu. Un beau matin, la peur panique […]
Porté par un casting impressionnant, le nouveau film de Dominique Cabrera recèle de vrais moments de grâce.
Avec ce film, Dominique Cabrera fait écho à son très beau autodocumentaire Demain, encore demain. Ici, il s’agit d’une femme, Christelle, qui va brutalement quitter son domicile pour se mettre hors jeu. Un beau matin, la peur panique la saisit devant ce qui la relie au monde de façon flagrante, à ce moment X de son existence : un nourrisson. Et c’est elle qui va être frappée d’une petite mort subite. Incapable d’affronter cette troisième naissance, elle va fuir et s’engouffrer par hasard dans l’appartement d’une voisine. Laissant mari et enfants sans nouvelle, laissant sa place vacante, elle va en occuper une autre de force, squattant la sphère privée de Claire. Entre elles deux va alors se nouer une sororité sur le tas, forcée, dérangeante, éprouvante. De cette liaison régressive et réparatrice, des interactions vont naître. Et c’est ici, avec ce jeu de déplacements physiques et mentaux, que le film prend toute son ampleur. Le Lait… fonctionne sur le principe de la contamination. L’acte de Christelle va ébranler les sentiments des personnages qui l’entourent, les contraignant à se décentrer pour s’interroger sur soi et sur le lien avec l’autre. Parallèlement à cette circulation qui fonctionne très bien, le film se fonde sur un intéressant alliage de contraires. Il réunit des acteurs venant d’horizons très différents, reflets du brassage habituel de la vie ; et est parcouru de ruptures de rythmes et de ton : la scène d’ouverture flirte avec le fantastique, le pouvoir comique de Lopez agit en contrepoint du drame ambiant, l’état limite de Christelle engendre détresse, drôlerie, solidarité et âpreté. Les couleurs saturées tranchent aussi violemment avec le caractère intimiste du propos, comme si Cabrera avait voulu inscrire son personnage dans la vie à tout prix, la plongeant dans des lumières chaudes et un espace viable quoi qu’il en soit. Dans ce film sur la vulnérabilité du lien qui nous unit au monde, Cabrera n’est jamais aussi forte que lorsqu’elle délaisse le fil narratif pour les moments d’entre-deux, hors du temps, instants d’abandon ou de confidences. C’est là qu’elle parvient à capter de vrais moments de grâce.
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