En feuilletant les “Print the legend”, je me rends compte que j’ai très peu parlé d’actrices, alors que je les admire, les aime et en ai interviewé une légion. Pour réparer cette faute, j’ai longuement hésité entre l’intelligence pugnace de la reine Catherine Deneuve, les quilles sans fin et la british touch de la liane […]
En feuilletant les « Print the legend », je me rends compte que j’ai très peu parlé d’actrices, alors que je les admire, les aime et en ai interviewé une légion. Pour réparer cette faute, j’ai longuement hésité entre l’intelligence pugnace de la reine Catherine Deneuve, les quilles sans fin et la british touch de la liane Uma Thurman, la classe vive et chaleureuse de la sublime Carole Bouquet, la simplicité piquante de l’extrême-orientale et sympathique Maggie Cheung… Entre toutes ces fleurs éclatantes, j’ai finalement opté pour la moins célèbre, la moins présente sur nos écrans, mais peut-être la plus culte : Pam Grier, inoubliable panthère de Harlem, éternelle foxy lady de la blaxploitation, à la filmo longue comme un mois sans sexe, majoritaire en séries Z, téléfilms B et sitcoms C, rehaussée parfois d’un Carpenter ou d’un Burton.
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C’est le splendide Jackie Brown qui nous a donné, à Olivier Père et votre printeur, l’occasion de croiser cette éblouissante incarnation du féminin. Dans le film, Pam est géniale de beauté lasse, usée, enrobée, qui sait qu’elle a laissé derrière elle les meilleures années de sa vie mais reste toujours prête à bondir sur un éventuel second acte. Un mélange de combativité sexy et de mélancolie revenue de tout.
Dans le palace parisien où nous la cuisinons, elle est encore plus belle et beaucoup plus affûtée physiquement : une bombe, qui semble avoir 35 ans alors qu’elle en a forcément x de plus. Olivier et moi mutons en loups de Tex Avery, langues pendantes, sueur au front, gorges sèches, bégayant nos questions (quelques glaçons dans ton Evian, Olivier ?). Questions auxquelles lady G répond avec acuité : « La blaxploitation créait des exemples pour les Noirs. Je suis devenue une icône. On voulait créer des figures mythologiques, servir et aider la communauté noire. Mais mes films ont fini par lasser le public à cause du manque de renouvellement des scénarios. » L’ex- queen of blaxploitation est noire, certes, mais pas que… Un peu blanche aussi, indienne, asiatique.
Une ode faite femme à la splendeur du métissage, avec un cerveau et une sagacité que lui envieraient bien des starlettes :
« J’ai refusé le milieu parano du cinéma, le mythe de la réussite. Je préfère être comédienne que star. Il faut qu’on me propose quelque chose d’assez motivant pour me faire quitter ma ferme du Colorado. »
On approuve ce sens du discernement. Elle a ainsi bien fait de laisser son Colorado pour tourner avec son fan, Quentin Tarantino, dont elle a manifestement aimé la méthode. « Il cherche à imiter la réalité, avec des plans très longs. Le spectateur a une impression de temps réel grâce à des plans-séquences de neuf minutes de dialogues. »
Les Français n’oublient pas Pam Grier, même si depuis ce film, elle est retournée dans son Colorado et à ses caméos télévisuels américains. « Jackie Brown », le film et le rôle, sont taillés dans l’étoffe dont on fait les légendes.
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