Présenté hier en Compétition officielle, « Le Jour d’après » amène le système HSS vers un territoire plus personnel et tourmenté. Un film sublime.
Nouveau chapitre dans l’oeuvre d’un des plus grands réalisateurs en activité, Le jour d’après nous précipite une nouvelle fois dans les atermoiements amoureux d’un homme pris entre plusieurs femmes. Comme toujours chez Hong Sang-soo, il s’agit de saisir les subtiles variations dans le travail du motif, de percevoir le trouble qui vient agiter l’invariable surface d’une composition maîtrisée à la perfection.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Si les trois derniers films de HSS se présentaient sous la forme d’ambitieux puzzles temporels, ce nouvel opus semble avoir retrouvé une forme de linéarité plus simplement perturbée par le brouillage du temps. On pourrait même voir le film comme une synthèse de son cinéma, entre la pureté de The Day He Arrives (2011) et la complexité de Yourself and Yours (2016).
Un film magnifiquement tourmenté
Mais loin d’être le lieu d’un apaisement, cette synthèse accouche d’un film magnifiquement tourmenté. Le marivaudage habituel y prend un accent cruel, la tendresse a laissé place au sourd désespoir de Bongwan, un homme piégé dans sa passivité chronique, désespoir souligné par la déchirante petite phrase musicale qui parsème le récit.
A l’image de ces quelques notes proustiennes dont la limpidité est brouillée par un grésillement lo-fi, Le Jour d’après est l’histoire d’un parasitage inoculé via le personnage d’Areum, interprété par Kim Min-Hee. Entre une maîtresse et une épouse tout aussi antipathiques l’une que l’autre, Areum, son employée d’un jour qu’il laissera partir sans rien vivre avec elle, est à la fois le poison qui vient complexifier une situation déjà tendue et son possible remède.
Si ce potentiel relationnel ne sera jamais exploré par le récit, il habite puissamment son hors-champ, un imaginaire où Bongwan et Areum finiraient par s’arracher à l’ennuyeux duo maîtresse/épouse. Cette tension née d’une pulsion inassouvie, ce motif du rendez-vous manqué cher à HSS y trouvent une tragique et sublime illustration.
Un réalisateur au plus près de son film et de son actrice
Une dimension tragique renforcée par l’impression d’un film à fleur de peau, où l’intranquillité de son auteur, ses affects agités et sa fragilité semblent plus que jamais exposés. Au-delà de la dimension autobiographique de ce Jour d’après, on sent que la distance entre HSS et son film est ici ténue. Il se tient au bord du cadre, au plus près de son actrice, Kim Min-Hee, absolument éblouissante de charme et de subtilité. En trois films, il ne l’avait jamais filmée avec autant de désir. Sensuelle, mélancolique et déchirante, cette quatrième présence de Hong Sang-soo en compétition officielle tient toutes ses promesses et nous permet de rêver qu’il soit enfin récompensé par la Palme d’or.
Pour retrouver toutes les notes de nos critiques c’est ici.
Le Jour d’après de Hong Sang-soo (Corée du Sud, 2016, 1h32) avec Kim Min-Hee et Hae-Hyo Kwon – Compétition Officielle
{"type":"Banniere-Basse"}