Un prequel répétitif et disgracieux du Seigneurs des Anneaux. Pour les fans only.
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Peter Jackson le sait : pour faire exception dans le genre toujours menacé de kitsch qu’est l’heroic fantasy, il faut au moins un exploit technologique. Avec Le Seigneur des anneaux, trois films, douze heures et très exactement 3 420 effets spéciaux cumulés, il remplissait à son époque le cahier des charges capable de l’inscrire à la pointe de l’innovation et de l’imposer en totem geek des années 2000.
Mais l’époque a changé, et la nouvelle franchise du démiurge néo-zélandais, The Hobbit, toujours adaptée de l’œuvre de Tolkien, annonce clairement sa volonté de rattraper le train du cinéma US, convertissant son monde merveilleux à la 3D, profitant des avancées de la motion capture et, last but not least, tournant à quarante-huit images par seconde (contre les vingt-quatre traditionnelles qui bloqueraient, paraît-il, la fluidité des plans – on n’a pas vu le résultat).
Une fois déclinés les motifs de cet outillage, et acceptée l’injonction bizarre selon laquelle l’innovation au cinéma ne se mesurerait qu’en progrès techniques, que reste-t-il alors de ce premier Hobbit ?
Une machine puissante, sinon dévastatrice, un spectacle pyrotechnique total, un torrent d’images hypergraphiques au milieu duquel coule un tout petit film, ridicule, corseté dans son académisme et pris de vertiges d’esthétisme new age.
Aussi faut-il se méfier du titre, et de la promesse d’“un voyage inattendu”, tant l’histoire, située avant les aventures du Seigneur des anneaux, en reconduit littéralement tous les enjeux : revoilà donc la Terre du Milieu, peuplée d’orques, d’elfes, de trolls, et bien sûr de nains sympathiques guidés par Bilbon Sacquet (l’oncle de Frodon, campé sans malice par Martin Freeman), dont on suivra l’initiation à l’héroïsme en milieu hostile.
Tout est là, conforme à la précédente franchise, jusque dans la progression mécanique d’un récit d’apprentissage heurté par des séquences d’action à la flamboyance un peu vaine, souvent illisibles, que l’on jurerait calquées sur les adaptations vidéoludiques de la marque Tolkien (même fractionnement de l’espace, mêmes angles de vue impossibles).
Seuls changent le ton et l’atmosphère, plus proches du conte pour enfants (glissant parfois sur le slapstick), qui n’empêchent pas Peter Jackson de multiplier les informations et les lignes de fuite dans son vœu pieux de fidélité à l’œuvre originale.
Fidélité – ou conformisme – qui devrait rassurer les fanboys et épargner au cinéaste un ratage équivalent à celui de la prélogie Star Wars, mais qui signe aussi un manque criant de risque, d’inventivité, en somme, de point de vue.
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