On avait quitté Francis Veber sur le calamiteux Jaguar. Il opère ici un sérieux rétablissement avec l’adaptation de sa propre pièce de théâtre. Les gags ont été suffisamment rodés sur scène pour que le réalisateur sache les exploiter au maximum. Il a l’intelligence de réduire la durée à 1 h 20, ce qui donne un […]
On avait quitté Francis Veber sur le calamiteux Jaguar. Il opère ici un sérieux rétablissement avec l’adaptation de sa propre pièce de théâtre. Les gags ont été suffisamment rodés sur scène pour que le réalisateur sache les exploiter au maximum. Il a l’intelligence de réduire la durée à 1 h 20, ce qui donne un film tendu, rythmé, sans les temps morts si redoutables à la comédie. Mieux, il évite le piège qui consiste à vouloir systématiquement aérer les pièces par des scènes d’extérieur la plupart du temps inutiles. Ramassée sur une quasi-unité de temps et de lieu, l’intrigue pourrait se résumer comme suit : la connerie de Villeret va-t-elle empêcher Lhermitte de recoller les morceaux avec sa femme ? Car le dîner de cons du titre n’est qu’un point de départ. On ne le verra pas ce fameux dîner cher aux surréalistes, où quelques amis invitent chacun un con et se livrent ainsi à une sorte de concours. En revanche, Lhermitte, qui a trouvé en Villeret, fonctionnaire des impôts qui reproduit des monuments en allumettes, un véritable « champion du monde », va amèrement le regretter. Car là où on aurait pu craindre une overdose de cynisme, le propos de Veber est plutôt de montrer l’intelligence (du coeur) cachée des cons. A cet égard, il a parfaitement réussi son coup : on rit beaucoup, mais jamais au détriment des personnages principaux. Et ceci en grande partie grâce aux comédiens. Pour son film précédent, Veber ne pouvait pas compter sur de très bons acteurs avec Jean Reno et Patrick Bruel. Il est plus gâté ici. On louera en particulier le travail de Villeret et Prévost, si subtils, évitant la redite de leurs rôles antérieurs. Dans les meilleurs moments, on pourrait presque se croire dans une petite screwball comedy des années 30. Sauf que les héros de ces comédies en intérieur étaient souvent des héroïnes. Ici, non seulement les femmes ne sont que des silhouettes, mais le regard que porte sur elles Francis Veber est violemment misogyne : la première est nymphomane, hystérique et dépressive, la deuxième trompe son mari avec le contrôleur des impôts, et la troisième est en instance de le faire avec un publicitaire ringard alors qu’elle a quitté son premier amant pour le meilleur ami de celui-ci. Cette fausse note gâche un peu l’hilarité que provoque par ailleurs cette comédie, l’une des plus réussies de la carrière de Veber.
Olivier Nicklaus
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