C’est un joli film qui raconte sans romantisme une vie bien pénible. Celle d’une sportive de haut niveau qui pratique une discipline peu reconnue : la boxe thaï. Laetitia Lambert est championne du monde, rien que ça. Elle est crainte par ses adversaires. Pourtant, sa vie n’est pas bien drôle et épanouissante. C’est le sujet […]
Filmé au plus près, un documentaire sur la vie rude d’une boxeuse thaï de haut niveau. Un portrait d’une grande finesse.
C’est un joli film qui raconte sans romantisme une vie bien pénible. Celle d’une sportive de haut niveau qui pratique une discipline peu reconnue : la boxe thaï. Laetitia Lambert est championne du monde, rien que ça. Elle est crainte par ses adversaires. Pourtant, sa vie n’est pas bien drôle et épanouissante. C’est le sujet du film.
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Car comme tout possesseur d’un titre très envié, l’obsession de Laetitia (et de son staff) devient très vite : comment le garder ? Et c’est là que le film ne tente pas de dissimuler la vérité : pour demeurer au sommet, il faut quasiment tout reprendre à zéro : bo(x)sser comme une mule, surveiller son alimentation, garder la forme, courir, souffrir, cesser de penser.
Elle va perdre son titre si elle continue comme ça
Or Laetitia ne vit pas dans une sphère coupée du monde. Elle élève son fils, seule, à Vitry. Elle est dans la vie, nullement dans le cocon des sportifs ultra payés. Alors Laetitia se fait tout le temps engueuler par son entraîneur, parce qu’elle est trop lourde, parce qu’elle a dû bouffer n’importe quoi, qu’elle ne s’entraîne pas assez, ne fait pas assez de muscu, etc. Elle va perdre son titre si elle continue comme ça, c’est sûr…
Personne ne la soutient, tout le monde lui met la pression parce que c’est la méthode managériale la plus courante dans nos pays modernes. Parfois, Laetitia craque. Le plus souvent, elle s’entraîne comme un forçat, transpire et se frite avec des hommes machos qui la rabaissent parce que c’est le seul moyen qu’ils connaissent pour faire remonter un sportif au top niveau. Ils critiquent tout : sa technique, sa rapidité, ses réflexes émoussés. Tout est à refaire.
Le film décrit l’horreur du sport quand il est pratiqué à haute dose
Laetitia de Julie Talon, c’est le mythe de Sisyphe raconté avec affection : il faut tout recommencer tous les jours que Dieu fait et Julie Talon saisit Laetitia sans la juger, elle, et enregistre ce qu’il faut d’abnégation pour ne pas redevenir “rien” au sens macronien du terme. Le film décrit l’horreur du sport quand il est pratiqué à haute dose et qu’il devient une prison mentale et physique, torture acceptée.
Laetitia, sous son apparente modestie de mise en scène, décrit avec une finesse de trait remarquable un monde très dur où les moments de joie sont beaucoup plus rares et courts que ceux où le corps et l’esprit encaissent des coups. Une lutte absurde pour garder une médaille.
Laetitia Documentaire de Julie Talon (Fr., 2016, 1 h 20)
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